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DIAL 2533

BRÉSIL - Situation des homosexuels : la montée de la violence à leur égard contraste avec une avancée dans la conscience de leur droits

samedi 16 février 2002, mis en ligne par Dial

Les droits humains sont indivisibles. C’est une raison de plus d’être inquiet devant les agressions et assassinats dont sont victimes les homosexuels dans plusieurs pays d’Amérique latine. L’article ci-dessous de José Pedro S. Martins, paru dans Noticias Aliadas, 8 octobre 2001, parle de la situation au Brésil, tandis qu’un bref extrait de l’Agence ADITAL (Brésil) évoque la situation au Mexique.


Des organisations de droits humains ainsi que des militants en faveur de la citoyenneté homosexuelle intensifient une campagne en faveur des projets de loi en cours au Congrès, qui assureraient les droits élémentaires de la communauté gay et mettraient un frein à l’escalade de la violence contre les gays.

Entre 1999 et 2000, 299 homosexuels ont été assassinés, dont 67 % étaient gays, 30 % travestis et 3 % lesbiennes, selon les données du Groupe gay de Bahia (GGB), la plus connue et la plus active des organisations brésiliennes de défense des homosexuels. Deux tiers de ces crimes furent commis dans la région nord-est du pays.

“C’est le machisme du Nord-Est et l’intolérance envers les gays, les transsexuels et les lesbiennes qui sont la cause de ces morts”, a déclaré Luis Mott, président du Groupe gay de Bahia, dont le siège est à Salvador, capitale de l’État de Bahia, dans le Nord-Est.

Cette preuve que la violence anti-homosexuelle continue contraste avec l’optimisme qu’avait engendré la condamnation des “crânes rasés” José Nilson Pereira et Juliano Filipini Sabino à 21 ans de prison pour le meurtre de l’homosexuel Edson Néris da Silva. Da Silva a été tué à coups de bâton il y a un an par un groupe de 18 “crânes rasés” dans la ville de São Paulo.

“L’intolérance comme principe d’action est absolument condamnable”, c’est ce que déclarait la sentence émise par le juge Luís Fernando Camargo de Barros Vidal le 14 février.

La condamnation des “crânes rasés” a été considérée comme historique par les groupes de droits humains et les défenseurs de la citoyenneté des gays, lesbiennes et travestis. C’est la première fois au Brésil que sont condamnées des personnes impliquées dans des délits de discrimination sexuelle. Les autres 16 “crânes rasés” ne sont toujours pas jugés.

Le 6 février 2000, Da Silva, dresseur de chiens, âgé de 35 ans, marchait en tenant la main de Dário Pereira Netto sur la place de la République, quand il fut surpris par le groupe des “crânes rasés”. Da Silva fut durement frappé et il mourut des suites de ses blessures.

Après cette agression, les “crânes rasés” se dirigèrent tranquillement vers un bar du quartier de Bexiga, qui est aussi dans le centre de São Paulo. Ils furent arrêtés peu après, mais les groupes de droits humains et les défenseurs de la citoyenneté des gays, lesbiennes et travestis se mobilisèrent pour éviter qu’un crime supplémentaire, motivé par l’intolérance sexuelle, ne s’achève sans le châtiment de ses auteurs.

Un effort particulier a été fait par la Commission des droits humains de l’Assemblée législative de São Paulo. Le député Renato Simóes, du Parti des travailleurs (PT) et président de la commission déclara : “On avait peur qu’un autre crime ne finisse dans l’oubli et ne soit archivé.” Entre autres actions, la commission a promu deux audiences publiques dans l’Assemblée législative, ce qui est une façon de stimuler une large réflexion dans la société sur l’escalade des crimes contre les homosexuels au Brésil.

Durant le jugement, les deux accusés ont déclaré ne pas connaître les autres personnes impliquées, mais ils reconnurent avoir appartenu dans le passé au groupe Caracas d’ABC. Ce groupe est né dans la région ouvrière d’ABC, dans la zone métropolitaine de São Paulo. Il est essentiellement composé de jeunes de la classe moyenne inférieure et sans grandes perspectives d’insertion sur le marché du travail. Les carecas (calvos en portugais) [1] sont impliqués dans des faits d’intolérance raciale et sexuelle.

Les deux “crânes rasés” furent condamnés pour homicide triplement qualifié, mais la défense a déclaré qu’elle ferait appel de la sentence. Neuf autres membres du groupe des assassins demeurent prisonniers, et sept sont en liberté provisoire. Dans la sentence, Barros Vidal fut formel : “Deux homosexuels ont le droit de se donner la main en marchant dans la rue, tout comme deux personnes ont le droit de porter le crâne rasé, des vêtements et des bijoux exotiques.”

Les organisations humanitaires et de défense des gays, lesbiennes et travestis espèrent que les deux premières condamnations créeront un précédent pour la justice brésilienne.

Selon le Groupe gay de Bahia, on assassine tous les trois jours un homosexuel au Brésil, ce qui fait que ce pays est le premier au monde pour le nombre d’“homocides”, selon l’appellation donnée par ce groupe à ce type d’assassinats.

Par ailleurs, dans différentes couches sociales, on peut également noter une évolution de la conscience concernant les droits citoyens des gays, lesbiens et travestis. Un indicateur en est le Prix Triangle Rose, décerné aux personnes qui se sont illustrées dans la défense des droits humains des homosexuels. Le prix s’est fait connaître dans la presse comme l’Oscar Gay et il est décerné peu après la remise de l’Oscar cinématographique.

En 2000, le prix a été remis au ministre de la justice d’alors, José Carlos Dias, qui s’est déclaré en faveur de l’union civile entre personnes du même sexe, et au président Henrique Fernando Cardoso lui-même parce qu’il avait facilité une intervention chirurgicale pour le changement de sexe d’un transexuel.

Le ministre de la justice a annoncé à la fin de l’an passé son appui à la constitution d’un réseau national de protection des homosexuels qui est organisé de façon conjointe avec l’Association brésilienne des gays, lesbiennes et travestis (ABGLT).

Simões [2] défend la révision du Plan national des droits humains (PNDH), dans le sens d’un renforcement des mécanismes légaux de protection et de défense des droits des homosexuels.

Les organisations d’homosexuels sont également engagées aujourd’hui en faveur de l’approbation de trois projets en cours au Congrès national. L’un d’eux, du député fédéral Marcos Rolim, du Parti des travailleurs, interdit toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. L’ancienne député fédérale, aujourd’hui maire de São Paulo, Marta Suplicy, a présenté un autre projet pour la légalisation de l’union civile entre homosexuels. Le troisième projet, du député Nilmário Miranda, également du Parti des travailleurs, établit que n’importe quelle espèce de discrimination et de préjudice en relation avec l’orientation sexuelle est un délit.

L’avocat Paulo Mariante, membre d’Identité-Groupe d’action pour la citoyenneté homosexuelle, affirme : “Ce sont des projets qui seraient tous approuvés facilement si le gouvernement fédéral en avait la volonté politique.”

NOTICIAS ALIADAS


Meurtres homophobes au Mexique

En présentant le troisième rapport sur les crimes pour homophobie 1995-2000, le secrétaire exécutif de la “Commission citoyenne sur les crimes de haine pour raison d’homophobie” (CCCOH), Arturo Betancourt, a fait savoir qu’au cours de cette période on dénombre 213 personnes assassinées, dont 12 femmes et 201 hommes. (...)

Il a souligné qu’entre 1995 et 2000 ont été commises 17 exécutions d’adolescents et de jeunes homosexuels, âgés de 14 à 20 ans, dont les assassins étaient principalement des membres de leur famille ou des compagnons d’école. “Ceci indique le haut degré d’homophobie qui prévaut dans le pays, car il existe encore des groupes sociaux très conservateurs et intolérants qui préfèrent exterminer leurs jeunes plutôt que de reconnaître leur différence sexuelle.

ADITAL


 Dial – Diffusion d’information sur l’Amérique latine – D 2533.
 Traduction Dial.
 Source (espagnol) : Noticias Aliadas, 8 octobre 2001 et ADITAL, juin 2001.

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[1Chauves en français.

[2Mentionné en fin de page précédente.

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