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DIAL 2720

CUBA - Les détracteurs et les défenseurs de la révolution cubaine sont toujours sur le qui-vive

vendredi 16 avril 2004, mis en ligne par Dial

La situation cubaine ne cesse de faire l’objet de points de vue diamétralement opposés : l’ardeur des défenseurs passionnés de la Révolution cubaine se heurte aux oppositions farouches de ceux pour qui Fidel Castro continue de représenter le dernier bastion du totalitarisme dans les Caraïbes. Il est aisé de souligner que la vérité est sans doute différente, qu’il est affligeant, par exemple, que la liberté d’expression ne soit pas respectée, que le régime politique reste antidémocratique comme tout régime à parti unique, que le droit à un procès équitable ne soit pas assuré, que la peine de mort ait refait surface. Mais il faut aussi reconnaître que les résultats obtenus par Cuba en matière d’éducation et de santé - dont il ne faut pas oublier qu’ils font aussi partie des droits humains - place l’île en tête des pays en voie de développement, que Cuba fournit une aide médicale appréciée à plusieurs pays d’Amérique latine, que le poids de l’embargo qui pèse sur ce pays du fait des Etats-Unis est une source importante de son sous-développement économique, etc. Il est clair que ceci ne doit pas - ne devrait pas - faire oublier cela. « Faire la part de la vérité » semble une entreprise vouée à l’échec là où les militants de toute sorte préfèrent un tableau en noir et blanc d’où toute nuance est bannie. Il est aussi essentiel que ceux qui vivent en dehors du continent latino-américain comprennent que le point de vue avancé sur Cuba n’est jamais élaboré en soi et pour soi, c’est-à-dire qu’il n’est pas détaché du rôle joué par les Etats-Unis en Amérique latine et les Caraïbes. Ce qui se passe à Cuba se situe au sein d’un rapport de forces continental et même mondial qui explique largement l’opposition des positions tenues. Nous publions ci-dessous les données d’un débat récemment suscité par la lettre publique de cinq intellectuels argentins sur la politique à suivre à l’égard de Cuba, ainsi que des réactions suscitées par cette lettre, sans compter quelques autres prises de position.


Cinq intellectuels argentins demandent un changement de politique vis-à-vis de Cuba, l’unique « dictature restant en Amérique latine »

Alors que n’est pas encore achevée la polémique suscitée par les critiques nord-américaines sur la politique argentine à l’égard de Cuba, un groupe d’intellectuels a demandé au gouvernement qu’il modifie ses relations avec les autorités de La Havane. Concrètement, ils demandent que des instructions soient données à l’ambassade de notre pays dans l’île pour qu’elle reçoive les dissidents du gouvernement de Fidel Castro.

Et ils mirent en cause la gestion de l’ambassadeur Raúl Taleb.

Marcos Aguinis, Fernando Ruiz, María Sáenz Quesada, Juan José Sebreli et Sylvina Walger, les cinq signataires de la lettre envoyée au ministre des affaires étrangères Rafael Bielsa, ont condamné ce qu’ils ont appelé « l’unique dictature restant en Amérique latine et où le mépris des valeurs de la liberté est le plus patent ». Les cinq écrivains veulent de cette façon se joindre à un mouvement qui s’est répandu principalement dans divers pays d’Europe et qui réclame l’ouverture démocratique de Cuba.

Depuis mars de l’année dernière, lorsque le gouvernement cubain emprisonna et ordonna que soient fusillés plusieurs dissidents, des personnalités en vue comme Pedro Almodóvar, José Saramango, Rosa Montero et l’organisation Reporters sans frontières ont dénoncé publiquement les violations des droits humains de la part du gouvernement castriste. A partir de ces faits, divers gouvernements européens ont décidé d’inviter des représentants de l’opposition cubaine aux réceptions officielles qu’ils donnent dans leurs ambassades. « L’heure est venue pour nos gouvernements [1] de donner des instructions à leurs ambassades à Cuba pour qu’elles s’ouvrent à tout le peuple cubain, tant pour leurs activités culturelles que pour leurs réceptions officielles » ont déclaré les intellectuels argentins dans leur Lettre de reconnaissance du mouvement civique cubain.

Consulté par La Nación, Aguinis a comparé le système politique cubain au stalinisme et a affirmé : « Il est honteux que nous, les Argentins, qui nous souvenons des violations des droits humains commis par la dictature, nous ne nous exprimions pas avec l’énergie requise pour défendre les droits humains dans d’autres lieux. C’est contradictoire et aberrant. »

Sylvania Walger a dit que l’idée avait été de réunir des intellectuels qui maintiennent une égale distance à l’égard des positions extrémistes favorables ou opposées à Fidel Castro et a avoué que la tache n’était pas simple parce qu’ « il y a beaucoup de gens qui ne veulent pas dire ce qu’ils pensent ». Après avoir rappelé son soutien initial à la révolution cubaine, elle s’est plaint de ce que des secteurs appartenant au progressisme argentin – dont elle fait partie – n’encouragent pas la condamnation des violations des droits humains à Cuba « par crainte de passer pour des partisans de Bush ».

« Aux gens de gauche, c’est Fidel qui leur importe, ce n’est pas le peuple cubain. On soutient ou on ne soutient pas Fidel. Et ils règlent le problème en disant qu’ils sont tous de la CIA. »

S. Walger soutient que l’Argentine devrait condamner Cuba à la Commission des droits humains des Nations unies qui aura lieu en avril à Genève. Mais elle a déclaré aussi qu’il faut condamner l’embargo.
Le ministère des affaires étrangères a fait savoir par ses porte parole qu’il ne répondra pas à la lettre et que « le ministre donnera des instructions à l’ambassadeur [2] en son temps ».

L’origine de l’initiative

La présentation de cette revendication est une initiative née du Centre pour l’ouverture et le développement de l’Amérique latine (CADAL), une organisation non gouvernementale et indépendante des partis, qui étudie la politique de la région et promeut les principes de la démocratie libérale. Le directeur de CADAL, Gabriel Salvia a déclaré : « Nous recherchons des écrivains et des journalistes qui sont critiques envers toutes les dictatures et qui se préoccupent des gens qui ne peuvent pas exercer le droit à la liberté d’expression. »

Joint au document des intellectuels, l’ONG a envoyé à Bielsa une lettre dans laquelle on lui demande de répondre à une demande formulée le 3 septembre dernier pour que l’ambassade argentine invite les dissidents. Elle sollicite également son opinion sur « les sentences de la justice cubaine dans les procès très sommaires contre les opposants pacifiques ».

Pour terminer, la lettre de Salvia demande la révocation de R. Taleb et son remplacement « par un fonctionnaire de métier à la hauteur de la tache diplomatique difficile qui consiste à représenter l’Argentine à Cuba ».

Les critiques faites à Taleb s’appuient sur ses déclarations publiées dimanche par La Nación, dans lesquelles il dit, entre autres choses, qu’« à Cuba, on ne viole pas les droits humains, ou, tout au moins, ni plus ni moins que dans d’autres pays du monde » et qu’il n’a pas reçu les dissidents parce qu’ils n’avaient pas demandé d’entrevue.

Interrogés par La Nación, Aguinis, Walger et Ruiz ont remis en cause Taleb parce qu’ils considèrent qu’il « n’est pas à la hauteur au plan politique et diplomatique ». Ils l’ont mis en cause parce qu’il aurait disqualifié le dissident Oswaldo Payá – qui « reçut le Prix des droits humains décerné par l’Union européenne et qui fut nomminé pour le Prix Nobel de la paix en 2003 », souligne la lettre de Salvia - et qu’il considère, par contre, les gens qu’il croise dans la rue et les employés de l’ambassade comme des dissidents avec lesquels il peut maintenir le dialogue. Ruiz, qui fut arrêté à Cuba en 2003 a déclaré : « Les propos de Taleb me paraissent un peu cyniques. On sait que le personnel de l’ambassade n’est pas fiable parce qu’il est recruté par l’Etat cubain.

Source : La Nación (Argentine), 22 janvier 2004

Des écrivains résidents sur l’île répondent

En réponse à la lettre de la semaine dernière à l’attention du ministres des affaires étrangères Rafael Bielsa par laquelle cinq intellectuels argentins ont demandé à leur gouvernement un changement dans ses relations avec les autorités de la Havanne, l’ambassade de Cuba en Argentine a présenté au ministère des affaires étrangères une missive de la part de dix auteurs résidant sur l’île caraïbéenne, soutenant qu’elle fait partie « d’une nouvelle campagne qui incite les gouvernements d’Amérique latine à se mêler grossièrement des affaires cubaines ». « 

Cuba a montré au monde de nombreuses preuves indiquant qui sont et pour qui travaillent ces prétendus défenseurs civiques et comment le thème des droits humains est de nombreuses fois manipulé contre nous », dixit la lettre que l’ambassade de Cuba a fait parvenir au Palais San Martin.

Le Message des écrivains cubains, comme s’intitule le document, est signé par Roberto Fernández Retamar, Pablo Armando Fernández, Reynaldo González, Eduardo Heras León, César López, Francisco López Sacha, Carlos Martí Brenes, Lisandro Otero, Graziella Pogolotti y Miguel Barnet.

A l’exception de Pogolotti, qui est né à Paris en 1931 et réside à Cuba
depuis 1939, tous les signataires sont nés à Cuba et vivent actuellement sur l’île.

La lettre à l’origine de cette réaction était destinée à Bielsa la semaine dernière et signée par Sylvina Walger, Marcos Aguinis, Fernando Ruiz, María Sáenz Quesada et Juan José Sebreli.

Par celle-ci, ils demandaient au ministre des affaires étrangères en poste à l’ambassade de notre pays sur l’île pour qu’il reçoive les dissidents du gouvernement de Fidel Castro.

De plus, ils mettaient en question la gestion de l’ambassadeur Raúl Taleb et condamnaient ce qu’ils appelaient « l’unique dictature restant en Amérique latine, où le mépris des valeurs de la liberté est le plus visible ».

La réponse

Les intellectuels cubains, dont la majorité a été récompensée dans le domaine littéraire par le gouvernement de Fidel Castro, s’en sont pris à la lettre présentée par leurs pairs argentins, qui a été diffusée par les médias la semaine passée, et l’ont accusée « d’être une manœuvre publicitaire contre Cuba et contre la dignité des peuples ».

Les dix auteurs ont aussi attaqué les dissidents du gouvernement de Castro. « Qualifier d’opposants civiques un groupe d’individus recrutés et payés par le gouvernement des Etats-Unis est attenter à la sensibilité, l’intelligence et les droits d’une nation souveraine », ont dit les écrivains cubains.

« Les présents signataires, écrivains cubains, artisans d’une culture diverse et plurielle et d’un dialogue authentique au sein de la société civile, dénonçons cette manœuvre contre Cuba, l’Argentine et contre notre Amérique », conclut le document.

Source : La Nación (Argentine), 27 janvier 2004

Le point de vue de Adolfo Pérez Esquivel , Prix Nobel de la Paix : Cuba entre l’amour et la haine... des intellectuels

Je ne sais pas comment définir les intellectuels. Cela m’a toujours posé problème. C’est peut-être parce que je ne me suis jamais considéré comme faisant partie de cette espèce privilégiée.

Ce que je sais très bien, c’est que toute personne, qu’elle soit ou non « intellectuelle », doit avoir le « sens commun », ce sens qu’on a pu définir comme « le moins commun des sens », mais qui vous avertit tout de même quand vous prenez des chemins erronés dans vos façons de penser ou d’agir et qui détecte les utilisations ou les abus.

Je crois que certains intellectuels ont perdu la sagesse. Peut-être même ne l’ont-ils jamais trouvée. De plus, ils développent leur mode de pensée sans tenir aucun compte des sentiments. C’est d’ailleurs une des grandes tragédies de notre temps. C’est une chose de voir et une autre de savoir regarder. Pour savoir regarder, on a besoin de le faire avec son cœur.

Cuba reste toujours un défi entre la raison et les sentiments. Il s’agit d’un processus révolutionnaire qui a engendré des tensions et des résistances entre l’amour et la haine. N’importe quelles actions, n’importe quelles choses, bonnes ou moins bonnes, que Cuba puisse faire, provoqueront des réactions favorables ou défavorables.

Fidel vient tout juste de dénoncer publiquement à La Havane au cours de la Rencontre de l’Hémisphère contre la Zone de libre échange des Amériques (ALCA), le fait que l’empereur Georges Bush veut détruire Cuba et l’assassiner.

Il veut détruire la Révolution qui a tant coûté au peuple cubain. Les Cubains sont prêts à la défendre et à donner leur vie pour garder la liberté et la souveraineté du pays. C’est alors que cinq intellectuels argentins ont écrit une lettre intitulée Lettre de reconnaissance au mouvement civique cubain. Parmi eux se trouve Marcos Aguinis, écrivain prestigieux et reconnu comme intellectuel qui s’est manifesté avec agressivité contre la Révolution cubaine. Evidemment, ces faits ne sont pas sans signification ; ils ont pour objectif de provoquer des réactions en chaîne et d’être utilisés par ceux qui veulent soumettre Cuba à l’Empire tout en alléguant qu’ils défendent la démocratie, la liberté, les droits humains, les libertés civiques et bien d’autres choses semblables exprimées avec beaucoup de mots vides de tout contenu.

La réponse a été immédiate de la part de nombreux autres intellectuels, des organisations et de bien des gens qui ont gardé le sens commun et qui luttent et travaillent pour des idéaux de société plus juste et plus fraternelle pour tous. Comme aussi de la part du peuple cubain qui cherche à préserver et à approfondir les acquis obtenus pendant plus de 40 ans de révolution et de lutte contre le blocus et les agressions de l’Empire. Ce même peuple cubain qui a réussi à survivre et à réaliser des objectifs sociaux, culturels et politiques que beaucoup de nos pays sont encore loin d’avoir obtenus.

Il est sans doute important qu’un intellectuel comme Marcos Aguinis s’inquiète de la situation des peuples, mais je voudrais signaler qu’il n’a pas condamné les agressions et les massacres en Irak et en Afghanistan par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Encore moins ne condamne-t-il la politique d’agression et l’expansionnisme d’Israël contre le peuple palestinien, et il ne condamne pas non plus le mur de l’infamie qui jour après jour s’étend pour séparer les Palestiniens, ni la politique d’agression de Sharon, ni les exécutions à mort sur la chaise électrique aux Etats-Unis, même pour les mineurs ! Combien de silences complices se cachent derrière les mots !

Nous sommes nombreux à élever la voix contre la peine de mort à Cuba et aux Etats-Unis et dans tous les pays qui gardent dans leurs lois cette application de la peine capitale, et nous continuerons à réclamer qu’elle soit éliminée dans le monde entier. De même nous réclamons l’arrêt de la peine de mort non légalisée qui chaque jour condamne plus de 35 000 enfants à mourir de faim et de maladies évitables, ainsi que tous les attentats terroristes d’où qu’ils viennent.

Marcos Aguinis prétend établir un parallèle entre la Révolution cubaine et la dictature militaire qui a provoqué en Argentine plus de 30 000 morts et disparus. Rien n’est plus faux ni plus mal intentionné que cette affirmation. La Révolution cubaine a eu lieu pour libérer un peuple et lui rendre sa dignité, et il faut reconnaître les avancées et réussites réalisées dans la vie du peuple cubain. Cette Révolution a obtenu de grandes succès mais a commis aussi ses propres erreurs qu’elle essaye de corriger. Elle doit construire de nouvelles façons de vivre tout en consolidant ses conquêtes.

La dictature militaire, elle, avait pour objectif de soumettre et de détruire le peuple argentin et les peuples de toute l’Amérique latine. Aujourd’hui encore nous souffrons des conséquences de la « doctrine de sécurité nationale » imposée depuis Washington [3]. L’empire continue toujours sa campagne d’agression contre Cuba en utilisant ceux qui lui conviennent.

Il serait bien qu’ils commencent à avoir un peu de « sens commun » et de conscience critique en ce qui concerne la Révolution cubaine et ses réussites et qu’ils l’aident plutôt à corriger ses erreurs. Il n’existe pas de société parfaite, mais toute société est perfectible et disposée aux changements. Cuba est un exemple pour tous les peuples du continent et du monde. Il est nécessaire que nous ayons le courage de soutenir le peuple cubain qui doit rester une lumière dans tous les défis de notre continent.

Marcos Aguinis connaît très bien l’histoire biblique de David et Goliath. David a dû apprendre à trouver la sagesse pour servir son peuple. C’est un long chemin que nous devons tous parcourir, plein d’imprévus, de chutes et de remises en route pour pouvoir continuer à construire.

Source : ALAI AMLATINA, 3 février 2004

De nombreuses personnalités, dont Rigoberta Menchú, Prix Nobel de la Paix, Ernesto Cardenal, théologien et ancien ministre, Ramón Chao, journaliste à RFI, soutiennent : Le droit à la vie de la Révolution cubaine

Comme chaque année, une nouvelle session de la Commission des droits de l’homme des Nations unies va se tenir. Et comme les années précédentes, Cuba se retrouve sur le banc des accusés.

Cette année, l’accusation contre Cuba se fonde sur les condamnations que la justice cubaine a prononcées contre les 73 présumés « dissidents », l’année dernière.

Il est surprenant que les nations européennes, la France à leur tête, qui se sont toujours prévalu d’une politique internationale souveraine, indépendante des desseins états-uniens, se prêtent à ce jeu.

Les membres de l’Union européenne, conscients que l’Espagne et l’Italie sont en réalité le cheval de Troie des Etats-Unis dans leurs rangs, conscients qu’ils feraient partie de la campagne savamment calculée contre la souveraineté de Cuba, ont fini par céder.

Cela n’aura servi à rien que le gouvernement cubain présente des preuves irréfutables et démontre que les « dissidents » étaient des personnes payées et pilotées par le principal ennemi historique de la souveraineté de Cuba, les Etats-Unis. Pour s’en assurer, il suffit de lire ou d’écouter les déclarations gouvernementales états-uniennes qui ne dissimulent pas leur intérêt à en finir avec la Révolution cubaine, et de voir que les « dissidents » jouent un rôle essentiel dans cette stratégie. Cela est de notoriété publique, tout comme les millions de dollars dépensés chaque année dans ce but. Les nations qui se prêtent à ce jeu le savent très bien, mais des intérêts divers justifient leur adhésion à cette agression politique.

Si des citoyens français, espagnols ou suédois servaient une puissance étrangère contre les intérêts et la sécurité de leur nation, et même s’ils se proclamaient « dissidents », ils seraient condamnés à de longues peines ainsi que leur Constitution le stipule. Aux Etats-Unis, peu d’entre eux échapperaient à la peine de mort pour « collaboration avec l’ennemi » et « trahison envers la patrie ». Et ceci, sans déclaration officielle de guerre, comme dans le cas de Cuba, dont les Etats-Unis agressent frontalement la souveraineté depuis 45 ans.

Mais il semble que Cuba n’a pas le droit de défendre sa souveraineté, son autodétermination et sa dignité, qui ont coûté tant d’efforts à l’immense majorité de la population, laquelle a prouvé qu’elle était décidée à défendre les acquis de la Révolution au péril de sa vie.
Pourquoi tant d’insistance à ce que Cuba retombe dans les bras de l’Empire qui, il y a 45 ans, la traitait encore comme une colonie ? Que cachent les discours contre Cuba où il est question de « démocratie », de « libertés civiques », de « droits de l’homme », et autres termes qui dans le cas présent sont « vides de sens », comme l’a dit récemment le Prix Nobel de la Paix Adolfo Pérez Esquivel ?

Pourquoi tant de rage contre Cuba ? Peut-être parce que Cuba est un « mauvais exemple » pour les pays moins développés ? Est-il gênant qu’un petit pays, ayant peu de ressources stratégiques à sa disposition, démontre qu’il est possible de lutter pour le bien-être de sa population ? Cela dérange-t-il qu’en 2003 l’indicateur économique de ce pays ait été supérieur à celui de tout autre pays d’Amérique latine ? Ou bien est-on effrayé que sur les 200 millions d’enfants qui dorment chaque nuit dans la rue, aucun ne soit cubain ? Est-on furieux que les systèmes d’éducation et de santé cubains soient plus perfectionnés que ceux de nombreux pays développés au monde, y compris les Etats-Unis, la France, l’Italie, l’Espagne et l’Angleterre ? Est-il gênant que le nombre de médecins par habitant y soit le plus élevé ? Est-ce un crime si Cuba a le plus faible taux de mortalité infantile du continent américain, juste derrière le Canada ? Est-ce un tort d’être le seul pays au monde qui « exporte » ses médecins vers les zones les plus défavorisées de plusieurs pays d’Amérique latine, et sans toucher un centime ?
Est-ce enrageant qu’elle ait atteint en 45 ans à peine des objectifs sociaux, culturels et politiques que la majorité des peuples ne connaissent pas, même en rêve ?

Et ce, malgré un blocus, le plus long dans l’histoire de l’humanité qu’une grande puissance ait imposé à une nation.

Est-il irritant que Cuba soit devenu le phare antinéolibéral du monde, et qu’elle brandisse la consigne selon laquelle « un autre monde est possible » ?

Oui, il s’agit d’une Révolution construite par des femmes et des hommes imparfaits qui commettent aussi des erreurs, mais qui ont démontré une volonté constante de les corriger.

Nous qui croyons en un avenir meilleur pour les peuples du monde, nous soutenons l’actuelle souveraineté de Cuba. Nous la soutenons pour que cette société continue de s’améliorer et de servir d’exemple.

Il n’y a pas de bonnes raisons, mais une obsession à condamner Cuba à Genève. Il n’y a pas de sincérité mais une avidité à punir Cuba. Les nations qui se prêtent au jeu états-unien savent que cette pratique diplomatique sert de prétexte pour maintenir le blocus, avec l’intention d’isoler et de détruire un peuple qui vit, travaille et lutte dans la joie et la dignité.

10 mars 2004

Rigoberta Menchú, Prix Nobel de la Paix, Guatemala.

Adolfo Pérez Esquivel, Prix Nobel de la Paix, Argentine.

William Blum, chercheur, ancien fonctionnaire du Département d’Etat, Etats-Unis.

Phil Brenner, professeur de Relations internationales, American University, Etats-Unis.

Hernando Calvo Ospina, écrivain, France.

Ernesto Cardenal, théologien, ancien ministre du gouvernement sandiniste, Nicaragua.

Ramón Chao, directeur de la Rédaction Amérique latine de RFI, France.

Heinz Dieterich, professeur, chercheur, Allemagne.

Eva Forest, écrivain, Espagne.

Carlo Frabetti, président de la Ligue des Intellectuels Antifascistes, Espagne.

Saul Landau, ancien chercheur du Congrès, Etats-Unis.

James Petras, professeur, chercheur, Etats-Unis.

Alfonso Sastre, écrivain, dramaturge, Espagne.

Source : Texte original paru dans divers journaux, dont Granma (Cuba), 15 mars 2004
Texte français, ici revu, paru sur le site de Palenque

Un communiqué de presse d’Amnesty international Le gouvernement doit libérer sans délai les prisonniers d’opinion

Dans son nouveau rapport, Amnesty International dévoile la situation actuelle de 75 prisonniers d’opinion interpellés dans le cadre de la répression de mars 2003, vague d’arrestations ciblées au cours de laquelle de nombreux dissidents ont été placés en détention. Si certains ont par la suite été libérés, beaucoup ont été condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement au terme de procès hâtifs et manifestement iniques.

« L’examen détaillé des affaires judiciaires les concernant fait clairement apparaître que ce sont des prisonniers d’opinion – détenus pour avoir exprimé leurs opinions de manière pacifique. Ils doivent être remis en liberté immédiatement et sans condition », a déclaré l’organisation de défense des droits humains.

Le rapport que publie Amnesty International livre des informations précises sur le statut actuel de la majorité des dissidents, accusés de diverses activités, notamment d’avoir publié des articles critiques sur des questions économiques, sociales ou de droits humains à Cuba, d’être impliqués dans des organisations non officielles qualifiées de « contre-révolutionnaires » par les autorités ou d’avoir des contacts avec des personnes considérées comme hostiles aux intérêts cubains.
En outre, ce document expose de façon détaillée les conditions de détention de ces prisonniers. Selon les informations reçues par Amnesty International, des mauvais traitements auraient été infligés par des gardiens de prison ou des codétenus bénéficiant de leur complicité. À titre d’exemple, le 31 décembre 2003, trois gardiens de prison auraient sorti Victor Rolando Arroyo Carmona de sa cellule et l’auraient roué de coups.

Par ailleurs, d’autres allégations ont fait état de prisonniers placés à l’isolement pendant des périodes prolongées et de détenus ne bénéficiant pas des soins médicaux appropriés.

Tout particulièrement, l’organisation de défense des droits humains dénonce la pratique qui consiste à incarcérer délibérément ces prisonniers d’opinion dans des établissements très éloignés de leur domicile et de leur famille. Bafouant les principes des Nations unies, cette pratique peut être considérée comme une sanction supplémentaire infligée aux prisonniers et à leurs familles.

D’autre part, les communications écrites et téléphoniques entre de nombreux prisonniers et leur famille ont fait l’objet de restrictions, mesure s’apparentant semble-t-il à une forme de harcèlement de la part des hauts responsables pénitentiaires.

« Les autorités cubaines doivent libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers d’opinion. En outre, nous les invitons à respecter les principes inscrits dans les normes internationales relatives aux droits humains ayant trait au traitement des détenus », a conclu Amnesty International.

L’organisation de défense des droits humains a recensé au total 88 prisonniers d’opinion à Cuba.

Mardi 16 mars 2004
Source : Index Amnesty International AMR 25/006/2004

Sur le site d’Amnesty International, vous pouvez consulter le rapport Cuba : One year too many prisoners of conscience from the March 2003 crackdown (index AI : AMR 25/005/2004).

Pour obtenir de plus amples informations, veuillez contacter le Service de presse d’Amnesty International à Londres, au +44 20 7413 5566.

Des Cubains en campagne contre la peine de mor

La campagne commencée le 9 mars par la coalition « Dialogue pour les droits » qui avait promu l’an passé une consultation nationale pour l’élaboration d’une charte nationale des droits et des devoirs fondamentaux, demande l’élimination de la peine de mort à Cuba.

Sur les 35 209 citoyens consultés, 87% se sont prononcés contre la peine de mort, donnée « qui nous encourage » à faire un « débat permanent sur cette affaire capitale », a déclaré à la presse le dirigeant opposant Leonardo Calvo. Un groupe de dissidents et de militants des droits humains ont signé devant la presse une pétition pour un moratoire sur l’application de la peine capitale, qui sera déposée à l’Assemblée du pouvoir populaire (Parlement).

Les opposants considèrent que la pétition est un pas « préalable et nécessaire » pour l’abolition de la peine de mort, sanction qui a été étendue en 1999 dans ce pays de 11 millions d’habitants à des cas de trafic aggravé de drogues, vol avec violence et corruption de mineurs.
La revendication s’appuie sur l’article 63 de la Constitution, selon lequel « Tout citoyen a le droit d’adresser des plaintes et des pétitions aux autorités, et d’être écouté ou de recevoir une réponse dans un délai raisonnable, conformément à la loi. ». Calvo, coordinateur de la coalition intégrée par diverses organisations de l’opposition, a déclaré que dans toutes les provinces se réaliseront, entre mars et octobre de cette année, des débats pour « le droit à la vie et sur la peine de mort ». Calvo a expliqué qu’un autre des objectifs proposés est de « pouvoir mener à Cuba le débat sur les droits humains. »

Source : Adital/Terraviva (Brésil),
20 mars 2004


 Dial – Diffusion d’information sur l’Amérique latine – D 2720.
 Traduction Dial.
 Source (espagnol et portugais) : voir à la fin de chaque texte.

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[1Ceux de la région.

[2Concernant l’invitation des dissidents.

[3Il s’agit d’une approche stratégique légitimant à l’intérieur des nations la conduite d’une « guerre », utilisant aussi bien des armes psychologiques que militaires, contre « l’ennemi intérieur », effaçant la distinction classique entre civils et militaires.

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