Accueil > Français > Dial, revue mensuelle en ligne > Archives > Années 2000-2009 > Année 2005 > Mai 2005 > BRÉSIL - Bilan sur la question de la terre : Paysans sans terre, réforme (...)

DIAL 2804

BRÉSIL - Bilan sur la question de la terre : Paysans sans terre, réforme agraire, terres indigènes, travailleurs esclaves. Un entretien avec Tomas Balduino, président de la Commission pastorale de la terre.

lundi 16 mai 2005, mis en ligne par Dial

Don Tomas Balduino, ancien évêque de Goias et actuellement président de la Commission pastorale de la terre s’est entretenu avec Dial à la fin du mois de mars 2005 pour faire un tour d’horizon de la situation générale de la terre au Brésil et donner son appréciation sur la politique suivie par le gouvernement de Luis Inacio Lula da Silva


Dial : Vous êtes président de la Commission pastorale de la terre (CPT). A ce titre, vous êtes une des personnes les mieux placées pour faire le point sur la situation des paysans et de la terre au Brésil. Pourriez-vous nous rappeler au départ ce qu’est la Commission pastorale de la terre ?

Tomas Balduino : Tour d’abord, mes remerciements à Dial. Je trouve que Dial est un instrument « numéro un » pour notre information en Amérique latine. C’est vraiment très bien fait, avec une visée sur toute l’Amérique latine, et avec profondeur. Il y a des données précises qui nous sont précieuses. Je remercie Dial pour tout cela. En même temps je sens que c’est pour moi une responsabilité de répondre à vos questions.
Quelques mots tout d’abord sur la Commission pastorale de la terre. C’est une pastorale des frontières, une pastorale marginale depuis son origine. Elle est née en juin 1975 dans le cadre de la pastorale de Mgr Fernando Gomez, notre patriarche, qui a dû faire face à la dictature militaire. Elle est née à une période de répression, comme un service aux paysans et aux agents pastoraux qui les accompagnaient. On a appris après, par des historiens et des sociologues, que le coup d’État militaire au Brésil avait eu lieu, non pas uniquement mais principalement contre des organisations populaires paysannes, parce que les militaires croyaient que le communisme international entrerait dans le pays par ces organisations paysannes. Ils sont tombés violemment sur ces organisations. Dans ce contexte, la naissance de la CPT a été un geste historique. Les organisations populaires au Brésil ont été renforcées par l’appui de l’Eglise. Et aujourd’hui, elles sont là. Elles sont une force, une espérance, et nous sommes toujours là, à la même place, derrière elles, sans vouloir prendre leur place, ni créer une organisation paysanne d’Eglise, mais en les considérant comme des sujets, auteurs et destinataires de leur propre histoire. C’est aussi ce qui s’est passé avec les Indiens, pour le Conseil indigéniste missionnaire (CIMI). Il s’agit dans les deux cas de la même méthodologie, issue de Medellín [1], consistant à considérer le pauvre, non comme un objet de notre action caritative mais comme sujet et protagoniste de sa propre lutte.

Le CIMI est né à peu près de la même époque …

En 1972, trois ans avant la CPT. Mais venons-en à la réforme agraire. Le Brésil est un pays de 8 millions 500 mille km2, avec environ 5 millions de familles qui ont besoin de terre pour vivre et travailler et qui n’en ont pas.

Dès le début de l’histoire du Brésil, ce fut la grande propriété. Le Brésil était divisé en 12 propriétés données aux amis du roi, appelés les capitaines héréditaires, et la grande propriété a continué jusqu’à aujourd’hui. Dans mon diocèse de Goias, il y a une propriété qui est traversée par une route goudronnée de 50 km, qui ne quitte pas de la propriété. C’est un échantillon de la situation actuelle.

Il y a une loi de la terre, datant de 1850, donc antérieure à la fin de l’esclavage, où il est précisé que l’accès à la terre au Brésil ne se fera que par achat ou par héritage. La question est donc celle-ci : de qui les Noirs vont-ils hériter ? Avec quoi vont-ils acheter ? Dans ces conditions, quel a été le chemin des esclaves pour accéder à la terre ? Ils sont allés loin, loin des villes, loin du contrôle des grands seigneurs. Ils ont pris « possession ». Le système de la « possession » a sauvé la réforme agraire jusqu’à aujourd’hui.

Le mot « possession » ici signifie bien ici occupation et non propriété ?

Oui, il s’agit bien d’occupation, mais c’était aussi un genre de propriété. Ce système était la façon dont les pauvres pouvaient accéder à la terre. En voyant cela, il a été décidé dans le code de droit civil, que personne ne pouvait être mis dehors après un an et un jour d’occupation de la terre. Aujourd’hui, le droit à la terre inclut deux modalités : d’abord la « possession » et deuxièmement l’enregistrement au cadastre, complété par une présence effective sur la terre. Cela s’est fait postérieurement à des luttes célèbres comme celle des Quilombos, avec cette lutte qui est le paradigme de toutes les luttes, celle des Canudos. Il s’agit d’un groupe de paysans, dans l’Etat de Bahia, conduits par un leader spirituel et charismatique, un maître pédagogue, Antonio Conselheiro, qui a créé une espèce de ville avec 20 000 familles venues de grandes propriétés du travail esclave. Les familles occupaient les terres et les faisaient produire d’une façon solidaire. Les besoins étaient satisfaits et il y avait une intégration remarquable. Cette situation a éveillé la rage et la méfiance des autorités, qui ont envoyé l’armée qui les a détruits complètement. 20 000 personnes sont tombées sous les armes. Telle est la façon de répondre aux paysans lorsqu’ils commencent à s’organiser et à vivre leur vie.

La réforme agraire est entrée dans notre Constitution en 1988. Elle a été considérée comme une nécessité, un besoin. Mais les constituants, liés à la terre, ont mis un obstacle insurmontable à la réforme agraire : ils ont introduit un article précisant que la terre productive n’est pas susceptible d’expropriation pour cause de réforme agraire. N’importe quelle terre peut être expropriée, de même n’importe quelle construction, mais c’est interdit si c’est pour atteindre un objectif relevant de la réforme agraire.

La terre productive est-elle une terre qui produit effectivement ou qui a une capacité de devenir un jour productive ?

Il s’agit d’une terre productive en acte. Il existe une grille d’évaluation qui permet de décider quelle terre est productive et quelle terre ne l’est pas. La conséquence de cette loi est d’avoir renvoyer la réponse au domaine judiciaire. Les soi-disant propriétaires ont donc recours au système judiciaire, qui va mettre des années et des années pour décider si une terre est productive ou pas. Pendant ce temps, les gens qui attendent d’avoir une terre pour vivre et travailler meurent. On a essayé de changer cette loi, mais elle fait partie du système.

Dernièrement, un plan national pour la réforme agraire a été obtenu du gouvernement de Lula sous la pression des diverses organisations populaires, mais cela va lentement, très lentement. Le gouvernement aurait pu agir de façon rapide, pour répondre aux besoins de tous ces gens qui ont besoin de terre. Mais l’actuel gouvernement de Lula a une assez grande considération pour les latifundias. Ce sont eux qui ont le pouvoir économique et le pouvoir politique et ce sont eux qui évitent l’expropriation. Fernando Henrique Cardoso a fait un essai de réforme agraire dans la perspective de l’achat de la terre, et il a créé pour cela la Banque de la terre. C’est un mauvais chemin parce que, pour que les pauvres puissent acheter des terres au prix du marché, il faudrait une fortune énorme, tandis que le système de réforme agraire qui passe par l’expropriation est une façon, non de confisquer la terre, mais de l’estimer à sa valeur, avec une échéance de 18 à 20 ans.

Voulez-vous dire que le paiement va être échelonné sur une période de 18 à 20 ans ?

Oui, il y a des titres de réforme agraire, les TDA, qui correspondent à la valeur de la terre, qui sont donc rachetés, mais les grands propriétaires refusent ce système d’expropriation.

En plus de la réforme agraire, il y a la réforme agricole, à savoir l’accompagnement de techniciens, la création d’écoles, de centres de santé, de routes, etc. La loi décide aussi de tout cela. Mais cela exige une forte volonté de la part du gouvernement car il faut pour cela des ressources. Or, dans l’actuel gouvernement de Lula, le social n’a pas la priorité, ni la réforme agraire, ni l’éducation, ni la santé, mais les engagements sur le marché international à propos de la dette extérieure, etc. Actuellement l’organisation des sans-terres, surtout le MST, dispose d’un instrument pour faire avancer la réforme agraire, à savoir l’occupation de la terre.

Ce mouvement s’est-il amplifié ?

Oui, il a augmenté. Il n’y a pas seulement le MST, mais il y a d’autres mouvements de travailleurs ruraux (Contag, …), des mouvements qui s’enracinent dans les bases syndicales. Le plus grand reste le MST, qui est issu des communautés ecclésiales de base. Celles-ci, avec leur vision de la réalité à partir de l’Evangile, ont stimulé la naissance de diverses organisations dans une perspective de justice sociale et de dignité. Le MST a l’appui de la CPT, et donc aussi de l’Eglise à travers la CPT.

Le gouvernement actuel tolère-t-il les occupations de terre ?

On peut mettre au compte du gouvernement Lula quelque chose de positif par rapport aux sans-terres : il ne réprime pas. Fernando Henrique Cardoso réprimait, lançait la police contre eux, lui demandait d’accompagner les marches des paysans, compliquait leur vie de nombreuses façons. Avec l’arrivée de Lula, ce fut un véritable soulagement pour ces divers mouvements en ce qui concerne l’occupation des terres. Le but des occupations est de forcer le gouvernement à faire les études requises pour établir si une terre est productive ou ne l’est pas, car autrement elles ne sont pas faites. Les occupations sont donc un instrument pour faire pression et accélérer le processus. Le gouvernement antérieur de Fernando Henrique Cardoso avait créé une mesure provisoire - au Brésil les mesures provisoires ont force de loi -, confirmée ensuite par le Congrès, qui pénalise les occupations : s’il y a occupation d’une terre, la situation de cette terre ne sera pas examinée avant 2 ans.

Cette mesure est-elle toujours en application ?

Elle continue. On aurait voulu que cette loi soit supprimée, mais ce ne fut pas possible… Alors, maintenant quand les paysans sont intéressés par une terre qui n’est pas productive, ils occupent la ferme d’à côté pour faire pression, et ainsi la terre dont il faut établir la productivité ne tombe pas sous le coup de la loi.

Il y a eu des discussions dans l’Eglise sur le système d’occupation de la terre. Il y a eu des divergences. La CPT a toujours appuyé ce système ainsi que plusieurs évêques qui sont avec nous. On cite même saint Thomas d’Aquin disant qu’en cas de pénurie, les biens sont communs. Il est intéressant que le document de la Commission Justice et Paix du Vatican de 1996 envisage l’occupation de la terre en l’appelant, non pas « invasion » comme les fazendeiros ou la presse brésilienne, mais « occupation ». Le document indique que lorsque ce phénomène se produit, la responsabilité doit être attribuée au gouvernement, ce qui retire toute crédibilité aux actions répressives contre le mouvement des sans-terres.

Nous avons obtenu un plan national de réforme agraire. C’est un plan élaboré d’abord par un groupe accepté par la CPT et par le MST et qui a été présenté au gouvernement.

Dans ce groupe, il y avait Plinio Sampaio.

Plinio Sampaio est son auteur. La proposition était de faire une réforme agraire dont profiteraient un million de personnes d’ici la fin du gouvernement Lula. Lula a diminué le plan en mettant 450 000 familles au lieu d’un million, et même ainsi l’objectif ne sera pas atteint, car il y a un écart assez grand entre le but indiqué par le gouvernement et ses réalisations. C’est pourquoi nous continuons de faire pression, de faire des occupations.

En même temps que les occupations, il y a la répression de la part des grands propriétaires qui sont organisés dans l’Union démocrate ruraliste (UDR), sont armés et font appel aux milices privés. Au cours de la première année du gouvernement Lula, il y eut 73 assassinats. Les fazendeiros se sont organisés pour faire la leçon aux travailleurs et à Lula, mais cela n’a pas diminué la force de ce mouvement paysan.
Je précise que le MST a naturellement pour objectif d’obtenir des terres, mais il dépasse cet objectif. Les membres du MST cherchent clairement un changement de société. Il en est ainsi depuis la naissance du mouvement. Il ne s’agit pas seulement de trouver le petit bout de terre qui va permettre à la famille de survivre, mais il s’agit de changer de structure sociale, il s’agit de dignité et de démocratie. Aujourd’hui, où il y a un recul du gouvernement Lula, le MST progresse en s’organisant avec d’autres forces, même avec des organisations qui n’ont pas la terre comme objectif, afin de créer une force qu’ils appellent la consultation populaire, qui a commencé il y a 9-10 ans. Cette année-ci, ils ont eu un congrès et ont relancé la perspective d’une lutte révolutionnaire, non pas dans le sens d’une révolution violente, mais d’une transformation de notre société. C’est un mouvement qui est un peu semblable au mouvement zapatiste de libération, qui ne cherche pas uniquement le bien des pauvres du Chiapas, mais se situe dans une perspective plus vaste, latino-américaine.

Qu’en est-il actuellement de la lutte contre le travail esclave ?

Cette lutte a beaucoup progressé sous le gouvernement Lula, malgré les pressions des fazendeiros pour qu’aucune surveillance ne soit exercée sur le travail dans les fazendas, il faut le reconnaître. Il s’est créé au niveau du gouvernement fédéral un Groupe mobile fait de techniciens liés au ministère du travail et accompagné par la police fédérale. Les fazendeiros voulaient être avertis avant que le Groupe mobile n’arrive sur leur terre afin qu’ils aient le temps de « maquiller » la fazenda, mais ils n’y ont pas réussi. La CPT et d’autres mouvements ont lutté contre le travail esclave en faisant des dénonciations dans la presse nationale et internationale. Cela a produit des effets extraordinaires sur le gouvernement qui ne veut pas avoir une image négative relevant du temps de l’esclavage colonial. Actuellement, il est vrai, c’est différent, car il s’agit d’un esclavage par dettes. Les travailleurs esclaves sont pris au piège d’une dette impayable, une surveillance armée les empêche de sortir de la fazenda. Les lieux de travail sont tellement éloignés qu’ils y sont conduits par avion et ils n’ont pas les moyens d’en repartir. Des lieux de travail esclave se trouvent au Brésil au centre de la forêt amazonienne. Le gouvernement a mis à la disposition du Groupe mobile des avions, hélicoptères, bateaux, etc. Au début, la punition était assez légère, ce qui explique que les fazendeiros aient pu retomber jusqu’à neuf fois de suite dans la pratique du travail esclave. Maintenant, c’est différent, parce que l’amende est très élevée. Généralement, le juge va sur place et il bloque immédiatement les comptes du fazendeiro par Internet, mesure totalement efficace. On voudrait un peu plus, c’est-à-dire la confiscation de la terre, car ce cas de figure existe déjà dans la Constitution lorsqu’il s’agit de cultures pour la production de drogue. On n’a pas pu faire la même chose en cas de travail esclave parce que les députés, qui votent les lois, sont eux-mêmes des latifundistes. Lula a lancé un projet non seulement de combat contre le travail esclave mais d’éradication. Il y a une équipe excellente, de plus en plus consciente et tout à fait compétente. Le travail esclave est une question de plus en plus contrôlée par la loi, par les agents de la loi et par les dénonciations.

Il serait intéressant de faire également le point sur la démarcation des terres indiennes.

Il faudrait poser cette question au CIMI qui pourrait répondre avec précision. Nous travaillons ensemble. Les Indiens se plaignent d’un manque de bonne volonté de la part du gouvernement Lula. Il y a un scandale que la presse vient de révéler : plusieurs enfants guarani-kaiowas viennent de mourir de faim. Autrefois, les Indiens avaient des terres pour vivre, maintenant, ils sont enfermés dans des enclos avec une petite case, un petit bout de terrain tout au tour, et ils ne peuvent plus vivre.

Les Indiens se trouvent enfermés dans un espace trop restreint parce que les autres terrains ont été appropriés par les fazendeiros.
Oui. Pourtant, la Constitution est claire et nette : les terres qui appartiennent aux Indiens depuis les temps immémoriaux appartiennent à l’Union – le gouvernement fédéral – et ne peuvent donc pas être aliénées. Malgré cela, les Indiens continuent à vivre sans leurs terres. Il y a même eu plusieurs suicides parmi ces Indiens kaiowas. L’un d’eux s’est suicidé le jour même de son mariage. Il a laissé un mot disant qu’il ne voit pas d’avenir possible pour sa famille sans une terre. Les vrais sans-terre aujourd’hui ce sont les Indiens. Il y a un cas paradigmatique dans l’Etat de Roraima, qui est actuellement soumis au Tribunal suprême fédéral. C’est le dernier recours pour les fazendeiros contre la reconnaissance d’une terre continue parce que de petites villes et des municipalités ont fini par envahir toutes les terres des Indiens qui sont devenus ainsi discontinues et que les Indiens voudraient récupérer sans discontinuité. Cette situation c’est un peu celle de toutes les terres qui doivent être démarquées. L’actuel président du Tribunal suprême fédéral, qui a été ministre de la justice sous Fernando Henrique Cardoso, est l’un des pires ennemis des Indiens. Le ministère de la justice est le ministère chargé des Indiens et comme ministre il a créé ce que l’on appelle le « contradictoire » qui est aujourd’hui une loi.

Qu’est-ce que le « contradictoire » ?

C’est reconnaître un droit de contestation à une personne qui a une construction ou un service dans une aire indienne,. Ce droit permet de porter l’affaire devant la justice, et l’affaire va mourir dans les papiers d’un tribunal.

Au point où nous en sommes, il serait bon d’élargir notre regard. Peut-on dire que le Brésil est actuellement orienté vers la naissance d’un Brésil nouveau ?

TB : On espérait que le Brésil prendrait un chemin nouveau. Telle a été l’espérance de diverses organisations populaires, de la grosse majorité de ceux qui ont élu Lula comme président. Lula est un président qui continue la même politique économique que son prédécesseur Fernando Henrique Cardoso, une politique néolibérale, même si on ne lui donne pas ce nom. C’est l’oubli de la perspective socialiste et de la libération par rapport à la dépendance créée par le capital international. Les diverses réformes qui ont été faites n’ont pas touché les grandes fortunes, n’ont pas empêché l’exportation des profits, n’ont pas régulé l’entrée et la sortie des capitaux. Au contraire, la perspective est de renforcer le Brésil comme puissance et d’affecter l’excédent au paiement de la dette extérieure. La pratique du gouvernement Lula qui va jusqu’à retirer des sommes qui sont dues au secteur social, pour ne pas faire défaut aux contrats internationaux. Cela a pour conséquence une augmentation du chômage dans le pays, un appauvrissement de la population, une augmentation de la faim, un manque de ressources pour la santé, l’éducation. Et en même temps, c’est le système de la privatisation des écoles, etc. La grande critique que l’on fait à Lula est de poursuivre la politique de son prédécesseur. La critique vient du Parti des travailleurs (PT) lui-même. Alors, c’est une assez grande déception. Il y a même eu une rupture, une dissidence à l’intérieur du PT qui a entraîné la création d’un autre parti. Mais à peine créé, cet autre parti recommence à penser aux élections, à retrouver une place au pouvoir, en continuant dans la même ligne qui a fait du Parti des travailleurs un parti électoral qui ne se préoccupe pas de sa base, Ils cherchent à se maintenir au pouvoir, à rester en place grâce aux élections mais ils ne s’engagent pas à partir de la base.

Diverses organisations populaires ignorant les positions du PT mais cherchant à s’allier aux bases du parti et à d’autres organisations comme les sans-terre, cherchent une nouvelle façon de construire à partir de la société civile. C’est une erreur de toujours penser un terme de pouvoir . Ainsi, des structures petites mais efficaces tentent de regrouper diverses forces dans le pays. Elles deviennent une espérance en faveur d’un changement proprement dit, car on n’espère plus grand-chose de la part du gouvernement.

Malgré toute la déception que l’on a par rapport à Lula, on pense que ce serait un mal pour le pays d’en revenir à l’élite qui a toujours gouverné le Brésil depuis le temps de la colonie, élite faite de généraux ou de grands propriétaires et industriels qui détiennent le pouvoir économique et qui s’entendent avec le pouvoir politique Si Lula est réélu, ce ne sera pas la solution mais un moindre mal. Ce sera mieux que de retomber dans les bras de Fernando Henrique Cardoso ou de quelqu’un d’autre comme lui. Je pense qu’on va supporter Lula encore quelques années car le changement avec lui sera difficile. Mais cela crée un climat possible pour une transformation à partir de la base. Alors que les autres membres de l’élite sont assez répressifs – ils investissent beaucoup dans les armes, la police, la surveillance de la société – avec Lula, un tel comportement est hors de perspective.


 Dial – Diffusion d’information sur l’Amérique latine – D 2804.
 Traduction Dial.

En cas de reproduction, mentionner la source francaise (Dial) et l’adresse internet de l’article.

Les opinions exprimées dans les articles et les commentaires sont de la seule responsabilité de leurs auteurs ou autrices. Elles ne reflètent pas nécessairement celles des rédactions de Dial ou Alterinfos. Tout commentaire injurieux ou insultant sera supprimé sans préavis. AlterInfos est un média pluriel, avec une sensibilité de gauche. Il cherche à se faire l’écho de projets et de luttes émancipatrices. Les commentaires dont la perspective semble aller dans le sens contraire de cet objectif ne seront pas publiés ici, mais ils trouveront sûrement un autre espace pour le faire sur la toile.


[1Où eut lieu en 1968 une célèbre Conférence générale de l’épiscopat latino-américain, où celui-ci-ci prit position en faveur des pauvres.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

>> PDF Formato PDF