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Revue Alternatives Sud, vol. XIV, n° 1 - éditorial

Évasion fiscale internationale et pauvreté

Mike Lewis

vendredi 4 mai 2007, mis en ligne par Centre Tricontinental

[>> Voir le sommaire du numéro.]

La libéralisation financière et l’idéologie économique dominante ont favorisé la prolifération de paradis fiscaux et de mécanismes permettant aux grosses fortunes et aux multinationales d’échapper à leurs responsabilités envers les Etats. Pour le Sud, les effets de l’évasion et de la fraude fiscales sont désastreux. L’alternative réside dans la
coopération internationale face au détricotage des systèmes de redistribution de l’impôt.

L’échec du financement du développement – et plus particulièrement l’échec des pays riches à fournir les augmentations promises des budgets d’aide aux pays du Sud – est en grande partie dû à un manque de volonté politique. La majorité des Etats du monde n’ont aujourd’hui pas la capacité d’assurer leurs dépenses en matière de santé, d’éducation et
d’infrastructures, principalement parce qu’ils ne parviennent pas à générer suffisamment de recettes fiscales pour les dépenses sociales. Cette crise fiscale est alimentée par une structure financière internationale, largement soutenue par les Etats du Nord, qui favorise la fraude et la fuite des capitaux. Combattre les causes de cette crise permettrait non seulement de couvrir l’actuel déficit de financement du développement au niveau mondial, mais également de corriger les aspects du système financier international qui contribuent massivement à la pauvreté et à l’inégalité mondiale.

Au cours des 25 dernières années, on a assisté à une accélération de la mobilité transfrontalière des capitaux et à l’essor d’un modèle de développement qui pousse les pays du Sud à offrir d’une part, des incitants fiscaux pour attirer les investissements étrangers, et
d’autre part, un accès intérieur aux flux financiers internationaux. La libéralisation financière et l’idéologie économique ont favorisé la prolifération de mécanismes permettant aux contribuables fortunés et mobiles ainsi qu’aux entreprises d’échapper à leurs responsabilités
fiscales envers l’Etat. [1] Entre le début des années 1970 et la fin de l’année 2004, le nombre de paradis fiscaux reconnus est passé d’environ 25 à 72. [2]

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime ainsi que la part du commerce mondial qui transite par les paradis fiscaux est passée durant cette période d’un pourcentage relativement faible à plus de 50%, bien que ces territoires ne
représentent que 3% du produit mondial brut. [3] Cette disparité extraordinaire montre à quel
point la plupart des principales entreprises mondiales profitent de la mobilité transnationale de
leurs capitaux pour blanchir leurs bénéfices au travers de paradis fiscaux et de pays à fiscalité
réduite, en utilisant une série de mécanismes tels que la refacturation, les prix de transfert [4] et
d’autres montages particuliers, entreprises fictives et trusts offshore. [5] Cette économie
« apatride » de l’ombre a érodé l’assiette fiscale des États-providence, particulièrement dans
les pays du Sud. A l’inverse, si cette richesse fuyante était normalement taxée, on obtiendrait
aisément les ressources nécessaires pour financer les Objectifs du Millénaire pour le
développement (OMD)…

Ampleur de l’évasion fiscale à l’échelle internationale

L’étude empirique de l’évasion fiscale internationale est une nécessité urgente.
L’opacité obsessionnelle des transactions et des dépôts dans les paradis fiscaux complique
toutefois son exécution. Pour autant, certaines estimations de l’ampleur du phénomène ont été
réalisées. Les calculs du Tax Justice Network estiment à environ 11,5 billions (milliers de
milliards) de dollars les avoirs personnels de fortunes privées à hauts revenus (HNWI) placés
dans les paradis fiscaux. La plus grande partie de cette somme est non déclarée et donc non
imposée dans le pays de résidence de leurs propriétaires (Tax Justice Network, 2005, 34-37). [6]

Les bénéfices d’une taxation équitable de ces seuls avoirs personnels – laissant donc
de côté les sommes indubitablement plus considérables perdues en raison de l’évasion et de la
fraude fiscales des entreprises – surpasserait largement toute augmentation réaliste des
budgets d’aide des pays riches. Le revenu annuel mondial de ces fortunes non déclarées
atteint probablement quelque 860 milliards de dollars. [7] La taxation de cette somme à un taux
modéré de 30% générerait dès lors environ 255 milliards de dollars par an, c’est-à-dire assez
pour financer les OMD dans leur totalité. [8]En résumé, il suffirait donc aux plus fortunés de
payer leurs impôts pour générer assez de fonds pour financer de manière immédiate la
réduction de la pauvreté mondiale de moitié.

Les répartitions régionales de l’évasion fiscale sont encore plus difficiles à obtenir que
les estimations globales. La plus grande partie des avoirs personnels et des ressources des
entreprises absorbés par les paradis fiscaux provient certes des pays riches, mais ce sont les
pays du Sud qui souffrent le plus de l’évasion fiscale, d’une part parce qu’ils ont plus à perdre
proportionnellement de la fuite des capitaux et des flux d’argent sale vers les paradis fiscaux
et d’autre part parce que leurs autorités fiscales sans moyens n’ont pas la capacité
institutionnelle de lutter sérieusement contre l’abus et la fraude.

Fardeau des pays du Sud

L’économiste Alex Cobham de l’Université d’Oxford (2005) utilise un modèle
économique simple pour estimer le montant global des recettes fiscales perdues en raison du
placement des avoirs personnels dans des paradis fiscaux et des transferts de bénéfices des
entreprises vers l’étranger. Il calcule que les pays en voie de développement perdent
annuellement 50 milliards de dollars de recettes à cause de chacun de ces deux mécanismes.
Si l’on y ajoute une perte de rentrées fiscales estimée à 285 milliards de dollars en raison de la
seule fraude fiscale « domestique », interne aux économies nationales « informelles » des
pays en voie de développement, le blanchiment des bénéfices des grosses fortunes
personnelles et des entreprises entraîne une perte astronomique de 385 milliards de dollars par
an dans les pays en voie de développement.

On considère généralement que plus de 50% des capitaux des individus fortunés
d’Amérique latine sont déposés dans des banques offshore (Boston Consulting Group, 2003).
Il existe peu de données concernant l’Afrique, cependant la plupart des analystes présument
que le pourcentage est similaire ou supérieur à celui de l’Amérique latine. En 1999, The
Economist estimait ainsi qu’à eux seuls les dirigeants africains possédaient 20 milliards de
dollars placés sur des comptes bancaires dans un seul paradis fiscal : la Suisse. Un chiffre qui
dépasse de plus de 30% le montant dépensé annuellement à cette époque pour le service de la
dette extérieure des pays de l’Afrique subsaharienne (Owuso, Garrett et Croft, 2000).

Cette fuite des ressources financières et cette érosion de l’assiette fiscale des pays du
Sud ne sont pas seulement catastrophiques pour les budgets sociaux nationaux de ces pays
pauvres, elles sont également régressives sur le plan international, l’essentiel de ces flux se
dirigeant vers le Nord. S’il y a bien une poignée de paradis fiscaux dans les pays en voie de
développement, comme l’Uruguay ou São Tomé et Principe, la plupart dépendent des riches
juridictions membres de l’OCDE, ainsi 35 des 72 paradis fiscaux sont juridiquement,
économiquement ou historiquement liés au seul Royaume-Uni.

L’architecture financière des principaux pays riches alimente de la sorte un véritable
vol du Sud vers le Nord, un détournement structurel et international d’argent, absorbant les
capitaux des régions pauvres vers les comptes bancaires suisses et les trusts offshore des îles
Caïmans, cet archipel britannique des Antilles. Les économistes James Boyce et Leoncé
Ndikumana de l’Université de Amherst (2002) calculent qu’entre 1970 et 1996 la fuite
accumulée des capitaux privés à partir des 30 pays les plus endettés d’Afrique subsaharienne
représentait 170% du PIB de la région, ce qui a forcément décimé les investissements et les
recettes fiscales en Afrique. [9] Une grande partie de cet argent est parti dans des paradis
fiscaux du Nord. Si l’on tient compte de cette fuite de capitaux, Ndikumana soutient que
l’Afrique – un continent généralement considéré comme irrémédiablement endetté – pourrait
en fait être le créancier du reste du monde.

Effets systémiques de l’évasion fiscale internationale

L’arrêt de la fraude et de l’évasion fiscales permettrait de rassembler assez d’argent
pour financer les Objectifs du Millénaire pour le développement (Alternatives Sud, 2006) et, à
long terme, les domaines de la santé, de l’éducation et des infrastructures dans les pays en
voie de développement, en fournissant des revenus durables qui pourraient aussi leur
permettre d’affronter le financement de leurs dettes. Des actions sont nécessaires pour mettre
un terme à la fraude et à l’évasion fiscales, non seulement pour combler le trou du financement du développement, mais également parce que les paradis fiscaux et l’évasion
fiscale nuisent à l’équité économique.

Puisque les capitaux mobiles sur le plan international profitent des paradis fiscaux et
des mécanismes de l’évasion fiscale, les personnes suffisamment fortunées pour étendre leurs
activités à cette échelle sont privilégiées par rapport aux gens ordinaires. Ces mécanismes
avantagent également les multinationales qui peuvent éviter l’impôt par des mouvements internes de capitaux ou de leurs avoirs, par rapport aux entreprises nationales. Même les
secteurs qui soutiennent que l’expansion des entreprises privées dans les pays en voie de
développement est la voie royale pour parvenir à une réduction de la pauvreté, doivent
reconnaître les dommages occasionnés par les paradis fiscaux et la fraude fiscale dans ces
contrées, en matière d’activités productives et d’accumulation de la richesse sur le plan
national (OCDE, 2004). En réalité, le secret bancaire et les services offerts par les institutions
financières transnationales qui mènent des opérations offshore rendent possible la corruption
politique, la fraude, les malversations et les trafics, mondiaux et illégaux, d’armes et de
drogues.

Le manque de transparence des marchés financiers internationaux contribue de facto à
l’expansion du crime organisé, du terrorisme, de la corruption de fonctionnaires sous-payés
par des entreprises occidentales, ainsi qu’au pillage des ressources par certaines
transnationales et élites politiques. D’un côté, les pays riches donateurs continuent d’insister
sur le fait que, dans les pays du Sud, la corruption constitue une menace pour le
développement ; de l’autre, on constate que les paradis fiscaux se situent pour l’essentiel dans
les juridictions de ces pays du Nord. Les transnationales dont le siège central s’y trouve ainsi
que celui des banques fournissent une infrastructure de qualité pour le blanchiment d’argent
provenant de la corruption et de tout type de transactions illicites. [10]

Plus insidieux encore sont les effets fiscaux systémiques de la fraude et de l’évasion au
niveau international. Ceux-ci poussent les Etats à s’engager dans une « course vers le bas »
des taux d’imposition, course qui consiste à baisser leurs propres taux d’imposition pour
attirer les investissements directs étrangers. Les conséquences de cette concurrence fiscale sur
l’équité et le développement économique sont discutées plus loin dans cet ouvrage.

Actions à entreprendre

La promotion d’un développement durable, libre de toute dépendance à l’égard de
l’aide et de la dette, et le renforcement de la participation et de la responsabilité politiques
resteront des objectifs difficiles à atteindre tant que les pays en voie de développement ne
parviendront pas à mobiliser leurs propres ressources nationales. La fraude et l’évasion
fiscales, qui plus est à une échelle démesurée, rendent cela impossible. Un système
international de taxes globales et des mécanismes financiers innovateurs s’avèrent vitaux pour
assurer, à court terme, le financement du développement. Pour autant, ils ne doivent bien
évidemment pas remplacer les outils fiscaux plus traditionnels qui consistent, dans les
différents Etats, à empêcher les plus fortunés et les entreprises d’échapper à l’impôt.
Cependant, cet objectif « traditionnel » appelle aujourd’hui de nouvelles mesures légales et
financières.

Contrairement à d’autres domaines, tels que la propriété intellectuelle et l’accès au
marché, les politiques et les lois fiscales n’ont pas réussi à s’adapter à la mondialisation,
demeurant résolument nationales, alors que les capitaux sont devenus internationaux. Certes,
les législations nationales pourraient déjà ralentir l’érosion des assiettes fiscales nationales, en
fermant certains mécanismes d’évasion ou en mettant fin au secret bancaire et aux avantages pour les non-résidents. De même, les efforts visant à rendre les entreprises plus transparentes
et à leur conférer une responsabilité sociale dans le paiement des impôts pourraient s’avérer
précieux, particulièrement dans des secteurs économiques comme celui des industries
extractives, dominés par des multinationales qui transfèrent leurs bénéfices des pays en voie
de développement, riches en ressources naturelles, vers les paradis fiscaux. [11] Ces mesures
nationales gagneraient à être supervisées et contrôlées par des institutions financières
internationales, dans le cadre des initiatives mondiales contre la corruption. Les efforts des
paradis fiscaux visant véritablement à plus de transparence et moins d’évasion fiscale
devraient aussi être rendus publics.

Cependant, on l’aura compris, une lutte efficace contre le problème généré par la mobilité internationale des capitaux implique nécessairement de dépasser les frontières des Etats et de prendre des mesures communes aux niveaux international et multilatéral. Parmi celles-ci :

 l’échange automatique d’information entre Etats sur le paiement d’intérêts, les dividendes,
les royalties, les droits de licence et autres revenus payés par des banques et des institutions
financières à des citoyens d’autres pays ;
 un accord international sur une base commune d’imposition des entreprises et de taxation
des bénéfices dans les pays où ils sont obtenus ;
 un principe général contre l’évasion, consacré par des lois nationales ou internationales, qui
mettrait fin à la course effrénée des experts fiscaux qui vise à profiter des lacunes des
législations et à s’engouffrer dans de nouvelles brèches au fur et à mesure que d’anciennes
sont colmatées par les autorités.

Tous ces objectifs devraient être encadrés par la création d’une autorité fiscale
internationale, comme cela a été proposé en 1999 par Vito Tanzi, chargé des matières fiscales
au Fonds monétaire international. Cette entité servirait à garantir que les systèmes fiscaux
nationaux et ceux des territoires dépendants n’aient pas d’implications dommageables au
niveau international, tout en oeuvrant à plus de coopération entre les Etats dans les domaines
clés de l’impôt des sociétés, de l’échange d’information et de la lutte contre l’évasion fiscale.
Les Nations unies devraient, idéalement, fournir le cadre pour la création de cette autorité
fiscale mondiale, grâce au renforcement substantiel du Comité d’experts des Nations unies en
matière de coopération fiscale internationale, lequel s’est réuni formellement pour la première
fois en décembre 2005. Cependant, ce Comité est actuellement dominé par les pays de
l’OCDE et les paradis fiscaux, et la représentation des intérêts des pays en voie de
développement est encore insuffisante.

L’« Initiative contre les pratiques fiscales dommageables » de l’OCDE a fait des pas
en avant dans la création d’un cadre pour la négociation d’accords bilatéraux d’échange
d’information fiscale. L’initiative a été élargie pour couvrir non seulement les juridictions des
paradis fiscaux des petites îles, mais aussi celles d’acteurs plus importants encore, comme la
Suisse et le Royaume-Uni, non repris jusque-là dans la liste des paradis fiscaux de l’OCDE.
Le dernier modèle d’accord fiscal contient une clause qui lève le secret bancaire et pourrait
donc s’avérer réellement efficace dans la lutte contre la fraude fiscale. En pratique cependant,
peu d’accords d’échange d’information ont été négociés et les gouvernements des pays en
voie de développement auraient besoin d’un soutien considérable pour y parvenir et pouvoir
utiliser efficacement l’information disponible.

En définitive, s’il revient bien aux institutions internationales telles que les Nations
unies et l’OCDE de relever de manière adéquate ce défi mondial sans précédent que
représentent l’évasion et la fraude fiscales, il incombe aussi à la société civile de les obliger, elles et les gouvernements nationaux, à prendre les décisions qui s’imposent. L’enjeu, comme
le démontre cet ouvrage, peut difficilement être plus important, et l’alternative plus cruciale :
ou l’on poursuit le détricotage des systèmes de services publics, de sécurité sociale, voire
l’anéantissement de toute possibilité d’en mettre sur pied dans les pays du Sud, ou l’on se
donne les moyens, par la lutte contre les paradis fiscaux et la concurrence fiscale, de financer
dès demain les Objectifs du Millénaire pour le développement et la réduction de la pauvreté
mondiale.


Bibliographie

Alternatives Sud (2006), « Objectifs du Millénaire pour le développement – Points de vue du
Sud », Paris – Louvain-la-Neuve, Syllepse – Cetri, Vol.XIII, n°1.

Boston Consulting Group (2003), Global Wealth Report 2003.

Boyce J.K. et Ndikumana L. (2002), « Public debts and private assets : explaining capital flight
from sub-Saharan African Countries », Université de Massachusetts, Département d’économíe
et Institut de recherche d’économie politique, Document de travail Nº 32, disponible sur :
<[www.umass.edu/peri/pdfs/WP32.pdf-> www.umass.edu/peri/pdfs/WP32.pdf]>.

Chavagneux Christian (2006), « Les paradis fiscaux au cœur de la mondialisation »,
Alternatives économiques, dossier, n°252, novembre.

Christensen J. et Hampton M. (1999), « All Good Things Come to an End », The World
Today
, Vol 55, Nº 8/9 (Royal Institute of International Affairs).

Cobham A. (2005), « Tax Evasion, Tax Avoidance and Development Finance », Queen Elizabeth
House, Série documents de travail Nº 129, Oxford.

OCDE (2004), Accelerating Pro-Poor Growth through Support for Private Sector
Development
, disponible sur <[webdomino1.oecd.org-> webdomino1.oecd.org]>.

Owuso K., Garrett J. et Croft S. (2000), Eye of the Needle : Africa debt report, Jubilee 2000,
disponible sur <[www.jubileeresearch.org-> ; webdomino1.oecd.org]>.

Oxfam GB (2000), « Tax Havens : Releasing the Hidden Billions for Poverty Eradication »,

Oxfam Policy Paper, 8 juin, disponible sur <www.oxfam.org.uk> ; .

Tax Justice Network (2005), Tax Us If You Can, disponible sur <[www.taxjustice.net-> ; www.taxjustice.net]>.

UK All-Party Parliamentary Group on Africa (2006), The Other Side of the Coin : The UK and
corruption in Africa
, disponible sur <[www.africaappg.org.uk-> ; www.africaappg.org.uk]>.


 Article original paru dans Social Watch Report 2006, Montevideo, Uruguay, sous le titre : « Global tax evasion ».

 Traduction de l’anglais : Sarah Siddiqui et Bernard Duterme.

Alternatives Sud (CETRI), vol. XIV, n° 1, 2007, « Évasion fiscale et pauvreté »

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[1Cette stratégie n’a pas seulement érodé le niveau des rentrées fiscales dans le monde en voie de développement, mais a également augmenté sa vulnérabilité face à l’instabilité financière internationale. Un exemple notable est celui de la formation du Bangkok International Banking Facility (BIBF) en 1992, qui faisait partie d’une stratégie agressive du gouvernement thaïlandais pour améliorer l’accès de ses entreprises aux marchés financiers internationaux. De l’étranger, on pouvait faire des dépôts ou contracter des emprunts dans les banques du BIBF et celles-ci offraient des prêts en monnaies étrangères en Thaïlande et à l’étranger. Elles fonctionnaient (donc) essentiellement comme un centre offshore qui garantissaient incitants fiscaux et autres exonérations en matière de business international. Lorsque la crise financière asiatique commença en 1997, le BIBF comptait à son actif près de la moitié des emprunts étrangers de la nation. La crise de la dette qui en a résulté et le revirement économique ont engendré une diminution du PIB thaïlandais de près de 12% et ont eu des impacts sévères sur le niveau de l’emploi et des salaires, entraînant ainsi plus d’un million de Thaïlandais
dans la pauvreté. Voir Oxfam GB (2000).

[2On entend ici par « paradis fiscal », un pays ou territoire dont les lois peuvent être utilisées pour éviter l’impôt
ou se soustraire aux taxes dues dans un autre pays, selon les lois de celui-ci. Parmi les principales caractéristiques d’un paradis fiscal, on retrouve donc : des cadres juridiques qui permettent aux non-résidents
actifs de payer peu ou pas d’impôts ; l’absence d’échange d’informations fiscales avec d’autres pays ; le manque de transparence légalement garanti pour les organisations qui s’y établissent ; la non-obligation pour les entreprises locales qui appartiennent à des non-résidents d’exercer une quelconque activité locale substantielle (ces entreprises peuvent en effet se voir refuser le droit de faire des affaires dans la juridiction choisie)... (Tax Justcie Network, 2005, 12-13).

[3Le ministre français des finances, Dominique Strauss-Kahn, s’adressant au Groupe d’experts de Paris en mars
1999, cité dans Christensen et Hampton (1999).

[4Ou cession interne entre branches d’une multinationale ; technique d’évasion fiscale fondée sur l’échange de
marchandises entre filiales d’une même entreprise, dont le propriétaire est le même, à des prix arbitraires,
indépendants de ceux du marché. Ceci permet de diminuer les impôts en déclarant des frais de vente élevés dans
des territoires à faible fiscalité et de faibles prix de vente dans les pays à fiscalité élevée.

[5Pour une explication détaillée des mécanismes de l’évasion fiscale au niveau international (fixation des prix de
transfert, capitalisation restreinte, refacturation, investissements d’entreprises, SPV - Special Purpose Vehicle,
fonds fiduciaires, etc.), voir Tax Justice Network (2005, glossaire).

[6Estimations réalisées grâce à l’utilisation des valeurs de la richesse offshore extraites du World Wealth Report
(Merrill Lynch / Cap Gemini, 1998) et du Global Wealth Report (Boston Consulting Group, 2003).

[7Selon des estimations de Merrill Lynch / Cap Gemini 1998 et du Boston Consulting Group, les détenteurs de la
richesse enregistrent des bénéfices sur leurs actifs de 7 à 8% par an.

[8Les Nations unies estimaient en 2005 que l’accomplissement des OMD nécessiterait un apport d’environ 135
milliards de dollars en aide publique au développement, somme qui atteindra 195 milliards en 2015.

[9Ce pourcentage comprend les bénéfices dérivés des intérêts touchés sur le volume des capitaux détournés.

[10Voir, par exemple, le récent rapport du UK’s All-Party Parliamentary Group sur l’Afrique (2006).

[11L’Initiative pour la transparence des industries extractives (EITI) constitue un instrument utile en la matière,
même s’il manque encore de l’appui et de l’engagement de certains pays et entreprises importants
(www.eitransparency.org)

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