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MEXIQUE - AMLO : un nouveau nationalisme de gauche latino-américain
Alejo Vargas Velásquez
mardi 18 décembre 2018, mis en ligne par
Lundi 3 décembre 2018.
Le 1er décembre, le nouveau président du Mexique a pris ses fonctions, Andrés Manuel López Obrador – connu comme AMLO –, chef éminent d’une gauche politique nationaliste très sui generis. Né dans l’État de Tabasco, il a remporté un triomphe électoral le 2 juillet de cette année – soutenu par plus de 53 % des voix – à la tête de son parti MORENA (Mouvement de régénération nationale), après deux tentatives préalables de candidature à la présidence en 2006 et 2012.
Les références politiques de López Obrador sont celles du parti historique, le PRI (Parti révolutionnaire institutionnel, héritier de la révolution agrariste mexicaine de 1910-1917) mais il s’est rallié très tôt aux membres les plus critiques de son parti. En 2000, il a été élu maire de la ville capitale du Mexique, Mexico DF, et a été l’un des maires qui a reçu le plus vaste soutien et la plus grande reconnaissance pour sa gestion au niveau tant national qu’international. C’est un responsable politique qui a une grande expérience de travail avec les gens, les paysans, les Indiens et les secteurs populaires, et qui a su trouver le temps d’écrire onze livres, dont le dernier s’intitule Ne pas dire adieu à l’espoir.
AMLO a toujours dénoncé les pratiques traditionnelles de corruption de la démocratie mexicaine et, pour cette raison, il est intéressant de mentionner la conception que López Obrador a de MORENA, en tant que parti politique, « …que MORENA ait pour fonction d’être un instrument de lutte au service de la société, c’est-à-dire le contraire d’un moyen au bénéfice de ses membres et surtout de ses dirigeants. »
Le Mexique a connu ces dernières décennies un développement du narcotrafic et du crime organisé qui ont multiplié les violences et mis en évidence la perte de contrôle de l’État central sur de nombreux territoires, ainsi que les effets néfastes des politiques économiques néolibérales, particulièrement du Traité de libre échange avec les États-Unis et le Canada – signé dans sa nouvelle version sous le sigle de T-Mec. Pour cette raison il propose, avec son mouvement politique, de réaliser la quatrième transformation la Révolution pacifique et démocratique, après les trois transformations historiques du Mexique : l’Indépendance, la Réforme et la Révolution.
Les défis prioritaires de Lopez Obrador et de son gouvernement sont les suivants. Un : récupérer la confiance de la société dans les institutions de l’État et les services publiques – avec l’État au-dessus du marché, a-t-il déclaré, « nous n’allons pas gouverner uniquement en fonction des marchés ». Deux : renouer avec le nationalisme mexicain historique – ce qui probablement sera facilité paradoxalement par le nationalisme de Trump, son voisin, avec son « l’Amérique d’abord » – et qui commencera par le contrôle de la politique pétrolière – et de PEMEX– et la gestion de l’électricité. Trois : donner une réponse positive aux problèmes de la criminalité, du narcotrafic et de la sécurité publique, en créant une Garde nationale avec des effectifs de l’armée, en redonnant aux forces armées mexicaines leur fierté nationale traditionnelle. Quatre : stimuler le changement du système des partis politiques du Mexique, et les articuler autour de Morena. Cinq : mener une politique extérieure basée sur la Doctrine Estrada qui privilégie l’autodétermination et la non-intervention dans les affaires internes d’autres pays. Six : lutter frontalement contre la corruption basée sur une politique d’austérité – à commencer par la Présidence, il a diminué son salaire de moitié et ordonné de vendre ses symboles de luxe tels que la résidence et l’avion présidentiels – et faire en sorte qu’avec un pourcentage élevé de participation citoyenne l’appareil d’État puisse orienter les dépenses publiques vers les secteurs les plus défavorisés du Mexique. Finalement résoudre le problème complexe de l’immigration, sans se soumettra aux dictats états-uniens.
L’Amérique latine observera avec attention ce qui, avec López Obrador, se passera au Mexique.
Alejo Vargas Velásquez est Professeur à l’Université nationale (Colombie)
Traduction française de Françoise Couëdel.
Source (espagnol) : http://olapolitica.com/opinion/amlo-un-nuevo-nacionalismo-de-izquierda-latinoamericano/