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EL SALVADOR - Jon Sobrino, rescapé d’un massacre (1989), rattrapé par l’inquisition (2007)

Hervé Camier

lundi 19 mars 2007, mis en ligne par colaborador@s extern@s

A San Salvador, capitale du Salvador, petit pays d’Amérique Centrale, le jeudi 16 novembre de l’année 1989, 1ère du mandat de G. H. Bush, les forces de l’ordre assassinent six religieux de l’Université Catholique, parce qu’ils ont dénoncé les crimes commis par le pouvoir local et continental. Le recteur, rentré la veille, est l’une des victimes. Le seul survivant, Jon Sobrino, absent ce jour-là, est condamné au silence en mars 2007 par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, ex-Saint-Office et Inquisition, dont le préfet était Joseph Ratzinger avant sa promotion comme pape.

Plus connu que les sept jésuites, l’archevêque Romero, lâché par Jean-Paul 2 [1] est tué d’une balle le lundi 24 mars de l’année 1980, 1ère du mandat de Reagan, pendant qu’il célébre la messe dans un hôpital où il loge. La veille, à la cathédrale, il avait appelé à la désobéissance militaire : “Devant l’ordre de tuer donné par un homme, c’est la loi de Dieu qui doit prévaloir : Tu ne tueras pas. Un soldat n’est pas obligé d’obéir à un ordre qui va contre la loi de Dieu… Au nom de Dieu, au nom du peuple souffrant dont les lamentations montent jusqu’au ciel et sont chaque jour plus fortes, je vous en prie, je vous en supplie, je vous l’ordonne : arrêtez la répression !”

Encore plus connu, l’attentat contre le pape lors d’un bain de foule sur la place Saint-Pierre, mercredi 13 mai 1981. Mehmet Ali Agça en voulait à Reagan, à Thatcher et au pape : attentat anti-Occident, vingt ans avant celui du 11/9/2001.

On reproche à J. Sobrino des erreurs au sujet des natures divine et humaine du Christ. C’est un prétexte : des erreurs au sujet du sexe des anges auraient autant et pas plus d’importance. Ce qui est visé c’est L’OPTION POUR LES PAUVRES faite par J. Sobrino, alors que le Vatican a fait, surtout depuis Jean-Paul 2, ‘l’option contre le communisme’.

En Amérique est classé communiste ce qui s’oppose aux intérêts des USA

● Dès 1954, 5 ans avant la libération de Cuba, qui a l’avantage d’être une île, Eisenhower, vainqueur d’Hitler 9 ans plus tôt, fiche le Guatemala comme communiste, parce que sa réforme agraire pourrait nuire (fort peu) aux intérêts de la United Fruit Company : ce criminel monte un coup d’Etat qui renverse le gouvernement, et la chasse aux “communistes” fera en 40 ans des dizaines de milliers de morts

● Au Chili, en 1973, le 11 septembre, juste avant de recevoir le Prix Nobel de la Paix, Kissinger, le plus influent des juifs états-uniens, président sans le titre de 1969 à 1975, renverse le démocrate Allende et installe le dictateur Pinochet. A noter qu’il y a autant de juifs aux USA qu’en Palestine, plus à New York qu’à Jérusalem

● Au Nicaragua, en 1979, les sandinistes réussissent à chasser la famille Somoza installée au pouvoir par les USA en 1933, et qui a assassiné Sandino en 1934.

En 1979, a lieu dans la région le premier des 107 voyages de Jean-Paul 2, totalisant 1 650 900 km . Fidel Castro l’invite à Cuba, mais il n’ira que 20 ans après, attendant toujours le renversement de Fidel, qui aurait pu lui expliquer que les crimes des USA en Amérique sont plus graves que ceux des soviétiques en Pologne

● En 1983, au Salvador, il serre la main du major D’Aubuisson, qui a commandé l’assassinat de l’archevêque Romero ; au Nicaragua, à sa descente d’avion, il humilie, en lui refusant sa main, le prêtre ministre de la culture (deux autres prêtres sont chargés de l’éducation nationale et des affaires étrangères), puis il refuse d’écouter les veuves et mamans des victimes de la contre-révolution armée par Reagan, et dans son mauvais espagnol il se met à critiquer les gouvernants de ce petit pays, mais les gens commencent à le comprendre et bientôt à le contredire et le huer, sans tenir compte de ses impérieux “Silencio !”.

En 1981, il avait placé à la tête de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, plus la Commission Théologique Internationale, plus la Commission Biblique Pontificale, le théologien Ratzinger, avide de pouvoir, pressé d’effacer le projet du pape Jean 23 : rendre l’Église aux pauvres et en ôter la “poussière impériale ” . Le “bon pape” († 1963) n’avait pas été écouté par le Concile (1962-65) qu’il avait convoqué, mais il a été suivi par la conférence latino-américaine de Medellin (1968) où la majorité des évêques participants a fait sienne LA THÉOLOGIE DE LA LIBÉRATION, bête noire pour Ratzinger.

En 1968, pour le premier anniversaire de la lettre de Paul 6, Populorum Progressio (le développement des peuples), on demandait à un curé-théologien péruvien, Gustavo Gutiérrez, une causerie sur le développement, et il répondit par une causerie sur la libération. Les USA, à l’aise avec la théologie du développement, sentirent leurs intérêts menacés par la théologie de la libération, ils multiplièrent les régimes dictatoriaux, et le cardinal Ratzinger, hissé au pouvoir en 1981, condamna la théologie de la libération en 1984. Le développement est une idée (trompeuse) de riches, qui se donnent comme modèle (impossible) à “rattraper” : pour que 1 milliard d’indiens et 1,3 de chinois rattrapent l’american way of life, il faudrait plusieurs Terres. A une époque où la Terre n’était pas menacée d’épuisement, Jésus donnait comme modèles les pauvres (Matthieu 5, 3), et il écartait les riches (Luc 6, 24). S’il n’est pas déjà trop tard, rejetons l’idée juive de domination de la terre (Genèse 1, 28 : “emplissez la terre et soumettez-la”) et prenons avec les “indiens” (d’Amérique) une attitude de solidarité avec la Terre-Mère. La négation du génocide 10 fois plus meurtrier que la Shoah, dénoncé par l’évêque Las Casas dans sa Brevíssima relacíon de la destruycíon de las Indías (1552) a été la pire gaffe du défunt pape : les 500 ans auraient, selon son discours à Saint-Domingue en octobre 1992, comporté “plus de lumières que d’ombres” ! En 1995, l’année de ses 75 ans, âge où l’abbé Pierre lui conseillait de renoncer comme les autres évêques, il a commis une autre erreur aussi monstrueuse, le refus “définitif” de l’égalité homme-femme dans la conduite de l’Église. Si en 1978 les cardinaux avaient écouté celui de Varsovie, S. Wyszynski, K. Wojtyła n’aurait pas été pape (G. Zizola, La restaurazione di Papa Wojtyła, 1985, p. 69 dans la version espagnole). Si en 2005 les cardinaux avaient écouté l’abbé Pierre, J. Ratzinger n’aurait pas été pape.

En 1984, le cardinal de Lima refusa de condamner G. Gutiérrez. En punition, le Pérou a maintenant 10 évêques Opus Dei, dont l’actuel cardinal de Lima, pour qui les droits humains ne sont que cojudez (c……….e) Après ces bêtes du pouvoir et avant l’extinction de l’humanité, aurons-nous encore des évêques humain(e)s comme Jean 23 et Helder Câmara ?

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[1Voir Témoignage Chrétien 1/4/1984.

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