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L’actualité en bref - octobre 2004
Nicolas Pinet
lundi 1er novembre 2004, mis en ligne par ,
AMÉRIQUE LATINE
Le nouveau secrétaire général de la Organisation des Etats américains (OEA) et ancien président costaricain (1998-2002), Miguel Angel Rodríguez, a présenté sa démission vendredi 8 octobre, 23 jours après sa prise de fonctions, du fait des accusations de corruption et d’enrichissement illicite pesant contre lui dans son pays. Premier costaricain à être élu secrétaire général depuis plus de 50 ans, il est aussi le premier secrétaire général de l’organisme à démissionner pour corruption. José Antonio Lobo, ancien ministre et conseiller de Rodríguez l’a accusé le 30 septembre d’avoir reçu de substantielles commissions lors de la négociation de contrats avec l’entreprise française de télécommunications, Alcatel. Le président costaricain actuel, Abel Pacheco, avait alors exigé sa démission.
Un rapport publié par le Bureau de Washington sur l’Amérique latine (WOLA), le Groupe de travail sur l’Amérique latine (LAWG) et le Centre pour la politique internationale (CIP) fait apparaître que l’aide militaire états-unienne destinée à l’Amérique latine a augmenté significativement depuis 2000. L’assistance militaire de 2003 a atteint la somme de 860 millions de dollars, et l’assistance économique et humanitaire, 921 millions de dollars. Si la tendance se maintient, note le rapport, l’aide militaire risque de dépasser l’aide économique et humanitaire, alors que, même au plus chaud de la guerre froide, l’assistance militaire n’avait jamais constitué plus du tiers de l’aide économique.
AMÉRIQUE DU SUD
Les ministres des pays du Mercosur (Marché commun du sud, constitué de l’Argentine, du Brésil, du Paraguay, de l’Uruguay et du Chili comme membre associé) et de la CAN (Communauté andine de nations, comprenant la Bolivie, la Colombie, l’Équateur, le Pérou et le Venezuela), réunis à Montevideo dans le cadre de la XIIIème Réunion du conseil des ministres des affaires étrangères de l’Association latino-américaine d’intégration (ALADI), ont finalement signé, lundi 18 octobre, un accord de partenariat économique. L’accord, qui entrera en vigueur le 18 novembre, marque le début d’un processus de suppression des barrières douanières qui devrait s’achever, dans 15 ans, par la constitution d’une zone de libre-échange. L’accord devrait faire des 10 pays d’Amérique latine le 5ème bloc commercial du monde.
ARGENTINE
La Cour suprême de justice a confirmé, jeudi 14 octobre, le principe d’une indemnisation pour les exilés de la dictature (1976-1983). Susana Yofre et les membres de sa famille, qui avaient reçu l’asile politique au Mexique durant 7 ans, recevront une indemnité de 74 pesos (soit environ 25 dollars) par jour d’exil. Après la loi d’indemnisation aux familles des détenus-disparus, puis aux prisonniers de la dictature et aux enfants des disparus, s’amorce un processus de dédommagement pour les exilés.
Après 5 mois de débat, le Congrès législatif a approuvé, mercredi 20 octobre, le projet du gouvernement de Néstor Kirchner disposant la création de l’entreprise nationale Energie argentine société anonyme (ENARSA), où l’Etat national détient 53% du capital, les provinces 12% et des investisseurs privés, 35%. La création de l’entreprise fut annoncée en mai dans le cadre du plan gouvernemental de lutte contre la crise énergétique. Dans les années 1990, le gouvernement de Carlos Menem (1989-1999) a procédé à la privatisation de la plus grande partie des entreprises publiques, avec parmi elles, les compagnies nationales de l’eau, de l’électricité, du gaz, des télécommunications et du pétrole. Le président Kirchner a accusé les entreprises chargées de la distribution du gaz d’avoir investi seulement dans le secteur le plus lucratif de l’exportation alors que la Loi nationale d’hydrocarbures les oblige à donner priorité au marché local.
Une étude publiée fin octobre par le Comité gouvernemental contre la torture, qui fait partie de la Commission provinciale pour la mémoire, fait état de violations répétées des droits humains dans les prisons et les commissariats de la province de Buenos Aires. Le nombre de détenus dans le district est passé de 15 000 à presque 25 000 durant les 4 dernières années, marquées par la crise économique, le chômage de masse, la pauvreté et l’exclusion – chiffre bien supérieur à la capacité d’accueil des prisons. On compte aussi 5 800 détenus dans les commissariats. L’étude dénonce de nombreux cas de tortures et de mauvais traitements.
BOLIVIE
Le Congrès bolivien a autorisé, jeudi 14 octobre, la Cour suprême à initier une procédure de jugement contre l’ancien président Gonzalo Sánchez de Lozada (2002-2003) et 2 de ses anciens ministres pour évaluer leurs responsabilités dans les évènements d’octobre 2003 qui avaient abouti à la démission du président et provoqué la mort de 67 manifestants. Le débat pour les relever de leur impunité a duré 12 heures.
BRÉSIL
Le second tour des élections municipales s’est soldé par une victoire du PSDB (Parti de la social-démocratie brésilienne) de l’ancien président Fernando Henrique Cardoso dans les régions les plus riches, notamment au sud du pays, et par la victoire du PT (Parti des travailleurs) dans les régions les plus pauvres, comme dans le nord et le nord-est. À São Paulo, le vote des secteurs centraux de la ville, plus riches, a, de la même façon, favorisé la victoire de José Serra, le candidat du PSDB et ancien candidat présidentiel en 2002, contre Marta Suplicy, candidate du PT qui a obtenu le soutien massif des périphéries. Si le PT a perdu la mairie de Porto Alegre, après 16 ans au pouvoir, le nombre de mairies qu’il contrôle désormais passe de 187 à 409 (le nombre de celles contrôlées par le PSDB passe de 996 à 871.) Un autre phénomène notable est la croissance de petits partis de gauche. Le Parti populaire socialiste (PPS), issu de l’ancien parti communiste, a conquis la mairie de Porto Alegre, ainsi que diverses mairies de grandes villes. Le Parti démocrate travailliste, qui a rompu avec Lula l’année dernière, et le Parti socialiste brésilien, qui fait toujours partie de la coalition autour du PT, ont chacun gagné dans 3 capitales.
CHILI
Les élections municipales du dimanche 31 octobre, qui étaient aussi l’occasion pour la Concertation (coalition de centre-gauche) et l’Alliance pour le Chili (coalition de droite) de mesurer leurs forces avant les présidentielles de 2006, ont été marquées par une nette victoire de la Concertation. La coalition au pouvoir a obtenu 205 mairies (44,79% des suffrages), contre 103 pour l’Alliance (38,65%). La victoire de la Concertation est encore plus marquée en ce qui concerne les conseillers municipaux (1 120 conseillers contre 877 – respectivement 47,91% et 37,66% des suffrages). Les indépendants ont obtenu 31 mairies (9,7%) et le pacte Juntos Podemos (Ensemble, c’est possible), alliance du Parti communiste et du Parti humaniste, 4 mairies (5,91%). L’Alliance pour le Chili a conservé de justesse la mairie de Santiago-centre.
COLOMBIE
Une Décision signée par l’Organisation nationale indigène de Colombie (ONIC) et l’Association des autorités indigènes de Colombie (AICO), qui réunit les « sages anciens », chefs spirituels des 90 peuples originaires colombiens, a fait savoir, début octobre, que les indigènes colombiens se refusent à recevoir des crédits ou des prêts, du BID (Banque interaméricaine de développement) notamment, ou tout type d’aide qui mettrait en danger leur diversité, leurs territoires, leur patrimoine culturel, leur sagesse ancestrale et la « cosmovision propre à chaque communauté ». Ils refusent d’être « impliqués dans les marchés formels, les circuits financiers ou l’économie de marché ». Ils acceptent par contre toute donation qui favorise leurs « processus d’organisation », l’affirmation de leur « autonomie et de leur identité » et la préservation de leurs « territoires, garanties et droits ». Ils acceptent aussi « la création de fonds spéciaux qui répondent aux exigences des peuples indigènes » en fonction de leurs « plans de vie », élaborés par chaque communauté réunie en assemblée, et qui correspondent à ce que la « culture occidentale » nomme « plans de développement ».
CUBA
Un groupe de femmes dont les maris sont prisonniers pour raisons politiques ont pris l’habitude de se réunir chaque dimanche à l’église de Santa Rita, patronne de l’impossible. Toutes vêtues de blanc, d’ou leur nom de « dames en blanc », elles portent sur la poitrine une photo de leurs maris, dont elles clament l’innocence et réclament la libération. Pour Elizardo Sánchez, président de la Commission cubaine des droits humains et de la réconciliation nationale, non reconnue par le gouvernement, l’action du groupe de femmes est un phénomène inédit.
Une résolution de la Banque centrale met fin à partir du 8 novembre aux transactions commerciales internes en dollars. Les dollars états-uniens ne seront plus acceptés et devront être changés préalablement en pesos convertibles, la transaction étant soumise à une taxe de 10%. Le dollar sera la seule monnaie affectée, l’euro et les autres monnaies continueront à être changées et à circuler comme avant. La mesure a été présentée comme la réponse cubaine aux actions du gouvernement états-unien visant à faire obstacle à l’accès du dollar sur l’île et à l’usage des devises états-uniennes récupérées par le gouvernement cubain.
HAÏTI
Le 30 septembre, date anniversaire du premier coup d’Etat contre Aristide, des centaines de personnes manifestèrent pour réclamer son retour et furent réprimées par la police. Les affrontements causèrent la mort de 3 ou 4 policiers et de quelques civils. Le lendemain, apparaissaient les corps décapités de 3 policiers et des partisans d’Aristide déclaraient qu’avait commencé « l’opération Bagdad » – en référence aux décapitations réalisées par des groupes armés en Irak – et qu’elle continuerait jusqu’au retour de l’ancien président au pouvoir. Depuis lors, les rues de Port-au-Prince, la capitale, sont le théâtre d’affrontements récurrents, qui ont déjà provoqué plus de 60 morts, dont 9 policiers. Les forces de l’ONU s’affrontent désormais directement avec les rebelles, souvent très bien armés. L’ambiance tendue et les combats font craindre une guerre civile.
MEXIQUE
María Sánchez sera la première femme indienne à prendre la tête, en décembre, d’un municipe au Chiapas, Etat du sud-est mexicain. La dirigeante a réussi à vaincre, lors des élections de juin puis d’octobre, les « usages et coutumes indigènes » du municipe d’Oxchuc, et d’une grande partie du Chiapas, selon lesquelles les femmes ne sont pas aptes à tenir le bâton du commandement.
URUGUAY
La Cour suprême a confirmé, lundi 1er novembre, la victoire du candidat de gauche, Tabaré Vázquez, lors des élections présidentielles du dimanche 31. L’alliance de partis de gauche Encuentro Progressista-Frente Amplio-Nueva Mayoría (Groupement progressiste-Front élargi-Nouvelle majorité, EP-FA-NM pour ses sigles en espagnol), a obtenu plus de 50% des voix, contre environ 30% pour le Parti national et 10% pour le Parti Colorado actuellement au pouvoir. Il n’y aura donc pas de second tour. Le gouvernement du médecin socialiste Tabaré Vázquez sera le premier gouvernement de gauche depuis l’indépendance du pays, en 1825, et le seul à disposer d’une majorité parlementaire depuis 1966.
Dimanche 31 octobre, les Uruguayens devaient aussi se prononcer par référendum sur la réforme constitutionnelle qui ajoute à la Constitution un article déclarant que « l’eau est une ressource naturelle essentielle à la vie » et que l’accès à cette dernière et à tous les services de traitement des eaux sont des « droits humains fondamentaux ». La proposition a été approuvée par 60% des voix.
VENEZUELA
Le vice-président vénézuélien, José Vicente Rangel, en visite à Moscou, a conclu une série d’accords de coopération économique et technologique et acheté 40 hélicoptères russes qui devraient être livré dans les mois qui viennent à l’armée vénézuélienne. Des compagnies russes ont fait part de leur projet d’investir 500 millions de dollars dans une usine d’alumine au sud-est du Venezuela et de participer par des apports de capitaux et de technologie à divers projets concernant notamment le pétrole et le gaz. L’initiative participe de la politique d’ « alliances stratégiques » avec la Russie et la Chine qu’entend développer le président Chávez.
Dimanche 31 octobre était organisée l’élection des gouverneurs des 22 Etats (sur 23) et de 333 mairies. Les résultats définitifs seront connus jeudi 4 novembre. Selon les résultats partiels communiqués par le CNE (Conseil national électoral), lundi 1er novembre, 20 des 22 gouverneurs élus seraient chavistes. En ce qui concerne les mairies, il n’y a pas encore de chiffres déterminés, mais diverses sources reconnaissent que sur les plus de 200 mairies détenues par l’opposition, un bon nombre va passer aux mains des chavistes. Dans le district de la capitale, Freddy Bernal, un proche d’Hugo Chávez, a été réélu, et la mairie principale de la ville est passée des mains de l’opposition aux mains des chavistes. Après une participation massive lors du référendum d’août, c’est l’abstention cette fois qui a été massive – plus de 55% des électeurs ne sont pas allés voter.
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