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MEXIQUE - Plus de 150 000 enfants de paysans migrants sans école
Gerardo Villagrán del Corral
jeudi 3 octobre 2024, mis en ligne par
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14 juillet 2024.
Au Mexique ce sont entre 279 000 et 326 000 filles, garçons, enfants et adolescents de familles de journaliers agricoles migrants, qui sont en âge de suivre une instruction primaire mais dont 50% et 80% d’entre eux ne vont pas à l’école, en raison des multiples obstacles aussi bien économiques que du système éducatif lui-même, a révélé le Secrétariat de l’éducation publique (SEP). La pauvreté les oblige à travailler et à renoncer à sortir de leur condition.
L’étude Atención educativa a niñas, niños y adolescentes de familias jornaleras agrícolas migrantes. Situación actual y perspectivas a partir de las acciones de las autoridades educativas [Assistance éducative aux filles, aux garçons et aux adolescents de familles de journaliers agricole migrants. Situation actuelle et perspectives selon les actions des autorités éducatives], élaborée par la Commission nationale pour l’amélioration continue de l’éducation (Mejoredu), signale qu’au cours du cycle scolaire 2020-2021 la SEP a pris en charge 38 804 élèves journaliers migrants dans divers niveaux de formation de base.
La situation de pauvreté, toutes générations confondues, à laquelle font face les familles, qui oblige les enfants et les adolescents à participer aux travaux agricoles pour aider la famille, outre les travaux domestiques et le soin des jeunes frères et sœurs, est un obstacle énorme. À cela s’ajoute le manque d’information des parents quant aux droits et aux soutiens dont ils peuvent bénéficier pour garantir le droit à l’éducation de leurs enfants qui, au sein des écoles, pâtissent de discriminations.
Selon le Conseil national d’éducation scolaire (Conafe) pour cette année scolaire ont été accueillis 5 723 élèves : à l’échelle nationale il s’occupe d’entre 13 et 16% d’enfants de journaliers agricoles en âge de suivre une formation élémentaire. De toute évidence leur accès à l’éducation est un problème qui n’est pas encore résolu.
La constitution imposait le droit des enfants et des jeunes à recevoir une éducation de base de qualité et disait qu’en préscolaire, primaire et secondaire on devrait disposer de matériels et de méthodes éducatives, d’organisation scolaire, d’infrastructures éducatives et d’un personnel enseignant et de direction qui veille à la réussite maximale de l’apprentissage. Mais l’injustice sociale et l’inégalité des chances éducatives dépendent de l’origine ethnique et de l’appartenance à un groupe social.
Les exigences et les démarches pour qu’ils aient accès à l’école, aux différents services éducatifs disponibles, ont été assouplies, même dans le cas où manque l’acte de naissance, seul document d’enregistrement de la population, ou l’accréditation scolaire, tel que le bulletin ou le certificat de scolarité.
Au-delà de la discrimination dans la salle de classe les enfants et les adolescents journaliers agricoles doivent aussi faire face aux attentes limitées et au peu d’importance que certaines des familles accordent à l’éducation. Pour des raisons culturelles, elles accordent souvent plus d’importance au développement de leurs capacités à des travaux agricoles, au travail domestique ou au fait qu’ils se marient et fondent leur propre famille.
À cela s’ajoutent l’absence de mécanismes pour le suivi de leur parcours scolaire, les caractéristiques sociodémographiques et académiques de ces mineurs qui, en raison de leur mobilité constante, ne peuvent pas suivre un cycle scolaire complet dans une même école ou bénéficier de certains services. Pour cette raison l’obstacle est important à leur permanence et leur évolution dans les divers niveaux scolaires.
Il n’existe pas non plus d’offre éducative spécifique et adaptée qui réponde aux besoins de cette population, en particulier celle qui relève de la langue, de la culture et du contexte dans lequel elle vit.
Le rapport signale également que la grossesse des adolescentes représente un autre défi. Les Autorités fédérales des quatre principaux états qui reçoivent des migrants (Basse Californie, Basse Californie sud, Sinaloa et Sonora) révèlent que les filles interrompent leur éducation pour s’occuper de travaux domestiques ou faire face à des grossesses à un âge précoce. Même si cette population parvient à accéder aux services éducatifs, leur séjour à l’école est de courte durée en raison des responsabilités qui sont les leurs.
Gerardo Villagrán del Corral est un anthropologue et économiste mexicain, associé au Centre latino-américain d’analyse stratégique (CLAE, www.estrategia.la).
Traduction française de Françoise Couëdel.
Source (espagnol) : https://estrategia.la/2024/07/14/sin-escuela-mas-de-150-mil-hijos-de-campesinos-migrantes-en-mexico/.